Articles Tagués ‘film’

Texte : Karine Tessier

La huitième édition du festival Longue vue sur le court débarque dans le Sud-Ouest de Montréal avec une nouvelle cargaison de courts métrages de fiction, documentaires et d’animation, du 23 au 27 novembre 2022. Au menu, plus de 70 œuvres, représentant 18 pays, dont 41 provenant du Québec et du Canada. L’occasion parfaite de découvrir des créations singulières de grande qualité, peut-être même avec les enfants, puisque quelques séances leur sont tout particulièrement dédiées. Fragments Urbains a visionné une partie du programme pour vous et vous parle de ses coups de cœur.

Piscine pro

Pour les amoureux de l’ironie et de l’humour absurde, Piscine pro est un must! On y retrouve le ton si particulier au scénariste et réalisateur Alec Pronovost, connu pour son travail sur les séries télé Le Killing, Complètement Lycée et Club Soly. Dans ce court, où brillent Louis Carrière et Alexis Martin, notamment, un bachelier en histoire, spécialisé en études sur les Vikings, s’ennuie à mourir dans un emploi de commis d’un magasin de piscines. Nul doute que ce petit film d’à peine huit minutes rappellera bien des souvenirs à ceux qui ont déjà occupé un boulot alimentaire, parachutés dans un domaine professionnel qui leur est totalement étranger.

III

Avec son premier court métrage, III, la scénariste et réalisatrice Salomé Villeneuve (la fille de Denis) attire l’attention, avec raison. Cette histoire de trois enfants qui entrent en conflit lors d’une sortie de pêche trouble, voire bouleverse. La jeune cinéaste souhaitait explorer, dans sa première œuvre, la faculté qu’ont les enfants d’aimer et de détester, parfois de façon soudaine. Dans ces jeux parfois cruels initiés par les petits, s’immisce par moments la violence, exprimée verbalement et physiquement. Un récit fascinant qui se déroule dans la beauté brute de la nature québécoise, mise en valeur par la superbe direction photo de Fred Gervais, qu’on connaît également pour son travail de photographe.

Suzanne & Chantal

Une création délicieuse que ce court métrage écrit et dirigé par la polyvalente Rachel Graton, dont on admire déjà les talents de comédienne et de dramaturge. Le film a d’ailleurs remporté le Prix du public de la compétition officielle au dernier Festival REGARD, à Saguenay. Dans cette fiction riche en surprises et en personnages truculents, Anne-Marie Cadieux et Béatrice Picard incarnent avec énergie deux complices tout sauf sages, qui partent en mission… dans un salon de coiffure! Une vue au rythme enlevant, qui célèbre l’amitié avec originalité. Dire qu’on aimerait retrouver ces femmes hautes en couleur dans un long métrage est un euphémisme!

La Théorie Lauzon

Cette nouvelle proposition signée Marie-Josée Saint-Pierre s’adresse autant aux fans invétérés du cinéaste Jean-Claude Lauzon qu’à ceux qui souhaitent le découvrir. Dans cet essai psychanalytique, on dresse le portrait de celui qu’on surnommait le « mouton noir » du septième art québécois, à l’aide d’archives, d’extraits de son œuvre et d’animation, sublimés par l’esthétique caractéristique de Saint-Pierre. La Théorie Lauzon se veut également une captivante et touchante réflexion sur l’identité et les relations père-fils. Le processus de création est définitivement l’un des thèmes de prédilection de la documentariste, elle qui nous a déjà proposé des courts sur le musicien de jazz Oscar Peterson, le cinéaste Claude Jutra, ainsi que l’animateur Norman McLaren. Un incontournable du festival.

La Guêpe

Dès les premières secondes de La Guêpe, on est happé par l’atmosphère anxiogène et la trame narrative énigmatique, accentuées par les mélodies d’une grande beauté signées Antoine Binette Mercier, avec l’incontournable Claude Lamothe au violoncelle. L’acteur et metteur en scène Marc Beaupré se révèle un réalisateur fort habile, avec ce premier effort, qui raconte le quotidien d’une propriétaire d’un motel plutôt crade, qui sera bouleversé par l’arrivée d’un inconnu. Dans le rôle titre, on retrouve avec bonheur Marie-France Marcotte, dont on a pu apprécier l’immense talent, cet automne, dans la série télé Avant le crash. Une performance magistrale, récompensée par un prix, à l’occasion du dernier Festival international du film Fantasia de Montréal. L’œuvre est également repartie avec le Prix du public – bronze, dans la catégorie du Meilleur court métrage québécois, lors de l’événement.

Little Berlin

Inspirée d’une histoire vraie, cette création de Kate McMullen raconte un pan de la vie dans un petit village allemand, pendant la Guerre froide. Et elle le fait d’une manière on ne peut plus inusitée… en racontant l’existence de Peter le taureau, marquée par la solitude, une fois que le rideau de fer le sépare de ses 36 concubines. En à peine un quart d’heure, l’œuvre réussit à nous faire rire aux éclats, autant qu’à nous émouvoir. Une proposition charmante, narrée de façon brillante par l’acteur Christoph Waltz.

Warsha

Un matin dans la vie de Mohammad, qui bosse dans la grue la plus grande et dangereuse de Beyrouth. Suspendu au sol, au-dessus des gratte-ciel, l’homme en profite pour assouvir ses désirs en laissant son esprit vagabonder. Dans ce court, la Montréalaise Dania Bdeir utilise la colorimétrie pour faire écho aux émotions de son personnage principal, d’abord étouffé par les conditions de travail difficiles et l’univers machiste des chantiers, puis libéré lorsqu’il se réfugie dans ses songes. La direction photo de Shadi Chaaban confère à l’œuvre une élégance indéniable. Dans le rôle de Mohammad, l’artiste multidisciplinaire Khansa offre une performance sensible, qui permet une réflexion nuancée sur la binarité, le genre et les limites de l’émancipation dans une société conservatrice. Tout ça au son de la musique de la légendaire Oum Khalthoum, considérée par plusieurs comme la plus grande chanteuse de l’histoire du monde arabe. Le film a remporté le prix du Meilleur court métrage international remis par le jury, cette année, au festival de Sundance. Un honneur amplement mérité.

Stranger Than Rotterdam With Sara Driver

Quelle histoire aussi surréaliste qu’hilarante que celle de Stranger Than Rotterdam With Sara Driver! Le court, signé Lewie et Noah Kloster, suit les péripéties de la productrice du deuxième film, culte, de Jim Jarmusch, Stranger Than Paradise, en 1982. On regarde pour la minutie de l’animation, le charisme de la protagoniste principale et parce qu’il s’agit assurément d’un des plus réjouissants behind the scene jamais proposés.

Partir un jour

Dans ce film mélancolique, mais empreint d’humour et de lumière, Amélie Bonnin nous raconte une histoire d’amour qui n’est jamais arrivée, ponctuée de chansons de 2Be3, Francis Cabret et Ménélik. Dans les rôles principaux, Bastien Bouillon et la chanteuse star Juliette Armanet sont terriblement charmants. On se régale tout autant du jeu de François Rollin, hilarant en père râleur. Une œuvre qui parlera à tous ceux qui, pour fuir l’ordinaire et réaliser leurs rêves, ont un jour quitté leur patelin pour la grande ville. Et qui ont réalisé tôt ou tard qu’aucun endroit n’est parfait et que la magie se trouve parfois là où on s’y attend le moins. Mention spéciale au générique, qui prend des airs de karaoké. Adorable.

Pour toutes les infos sur le festival Longue vue sur le court, c’est ici.

Texte : Karine Tessier

Sophie Desmarais et François Arnaud. Photo : IXION Communications.

Avec La Switch, son deuxième long métrage, le réalisateur et scénariste canadien Michel Kandinsky a choisi de raconter le retour au bercail du caporal Marc Leblanc, un tireur d’élite, dans une petite bourgade du nord de l’Ontario, mais surtout ses efforts pour tenter de retrouver une existence paisible, loin des champs de bataille. Avant sa sortie en salle, le 11 novembre, jour du Souvenir, l’œuvre a été présentée lors de la 28e édition du Festival de films francophones CINEMANIA. Fragments Urbains y a rencontré les acteurs François Arnaud et Sophie Desmarais, interprètes de Marc et de Julie, qui partagent la vedette avec Roch Castonguay et Lothaire Bluteau, afin de discuter entre autres de la genèse du projet, des défis rencontrés lors du tournage, ainsi que des conséquences tragiques de l’incapacité de communiquer.

Le parcours vers les écrans de cette nouvelle proposition de Michel Kandinsky a été sans aucun doute sinueux. « Il s’est écoulé plusieurs années entre le moment où j’ai reçu le scénario et celui où on a tourné le film, il y a deux ans. J’ai donc eu beaucoup de temps pour me préparer, ce qui est un véritable luxe. J’y ai longtemps réfléchi », explique François Arnaud, pour qui le réalisateur et scénariste a écrit le rôle de Marc Leblanc. Des mois à lire des bouquins, faire des recherches, rencontrer aussi des militaires qui sont allés en mission à l’étranger. Et à peaufiner le scénario.

Photo : Peter Andrew Lusztyk.

Désir d’authenticité

Au départ, La Switch devait être joué en anglais. Mais puisque peu de longs métrages sont tournés en français hors des frontières du Québec, le cinéaste y a vu une opportunité. « C’était alors vraiment important pour moi qu’on parle avec l’accent authentique de cette région du nord de l’Ontario, afin que ce soit crédible », confie le comédien québécois. « On tenait à ce que les gens de l’endroit se sentent représentés. Il a fallu trouver une personne ressource pour nous épauler et on a rencontré Julie, de Timmins. Le processus a duré deux mois, à coups de conversations sur FaceTime, explique Sophie Desmarais. Tout ça, dans le but d’arriver sur le plateau avec une liberté de jouer, sans se sentir contraints par l’accent. Je me suis d’ailleurs en partie inspirée de Julie dans la création de mon personnage. »

Bien que la serveuse qu’elle interprète, aussi prénommée Julie, ne soit présente que dans quelques scènes, l’actrice a rapidement été séduite par le projet. « C’est François, avec qui je suis amie depuis notre sortie de l’école, qui m’a approchée le premier. Par la suite, j’ai rencontré Michel, le réalisateur, et je l’ai beaucoup aimé. Je trouvais son approche très radicale, ce qui me plaît en général, peu importe les sujets qui sont abordés, poursuit la comédienne. Ce n’est pas un gros rôle, mais Julie sert un peu de contrepoids dans l’histoire. C’est un esprit libre. J’ai tout de suite apprécié sa force, doublée d’une insouciance, peut-être d’une inconscience, par moments. Je trouve ça le fun d’incarner des femmes qui s’assument! Elle amène une certaine légèreté, une énergie qui tranche avec celle des autres protagonistes. »

Photo : Peter Andrew Lusztyk.

Douleurs enfouies

En effet, le climat dans lequel baigne le long métrage est on ne peut plus morose, voire délétère. Marc, son père et son frère, qui ont aussi servi avec les Forces armées, taisent leurs souffrances, tant physique que psychologique, tentant d’éviter d’effrayer leur entourage ou, tout simplement, parce qu’ils craignent de ne pas pouvoir fermer les valves, une fois celles-ci finalement ouvertes.

« Le grand défi était de faire un personnage intérieur, réprimé, qui a tellement de difficulté à s’exprimer et à sortir de sa coquille. En même temps, il n’est pas complètement hermétique pour le public. On est avec lui. Il y avait aussi un travail de direction photo, afin de faire une œuvre d’un point de vue subjectif, précise François Arnaud. J’ai essayé d’incarner Marc le plus honnêtement et simplement possible. Je n’étais pas du tout dans un effort de transmission, au contraire! C’était presque comme du jeu masqué. Comme si mon personnage utilisait son visage en guise d’accessoire derrière lequel se cacher. Il se passe tellement de choses, en dessous, mais l’idée était d’en montrer qu’une infime partie. »

Dans La Switch, de nombreuses séquences sont quasi méditatives. On observe Marc préparer le petit-déjeuner, s’exercer au tir dans le champ vaste qui entoure la résidence familiale, arpenter les petites rues de la modeste localité.

« C’était presque une impression de documentaire, en fait. Pour cette partie du long métrage, je n’étais pratiquement pas dirigé, j’étais laissé à moi-même. Michel était juste là en témoin, il captait mes gestes avec sa caméra », se souvient François Arnaud.

Un tournage particulier, qui comportait une part substantielle de solitude pour l’acteur, qui mentionne au passage que les 25 premières pages du scénario ne comportaient aucun dialogue.

Photo : Peter Andrew Lusztyk.

« Les premières semaines, on filmait les scènes où j’étais tout seul. Alors, quand d’autres comédiens sont arrivés, j’éprouvais un sentiment paradoxal, une sorte de joie de pouvoir partager ça avec quelqu’un, doublée d’une sensation d’être envahi, confie le comédien. À l’inverse, à mi-chemin pendant le tournage, il y a une scène avec Lothaire Bluteau à l’intérieur de la voiture, durant laquelle il dit ce que mon père pensait de moi. Ç’a été une scène très, très touchante à tourner. C’était ardu pour moi de retourner, pour les séquences suivantes, dans la répression, de me renfermer de nouveau. J’avais envie d’être ouvert! »

Cette immersion dans les méandres de l’esprit torturé du jeune retraité, peuplés de fantômes d’ennemis assassinés ou de collègues abattus, est cruelle, mais étonnamment douce et toujours sans jugement. C’est que La Switch est à des lieues des films de guerre auxquels nous a habitués Hollywood. Ici, point de séquences boostées à la testostérone pour dire les affres de la guerre. Les plus grands ravages sont intimes. Le caporal peine à comprendre ce qui lui arrive, alors que les flash-back sanglants se succèdent et qu’il perd peu à peu pied dans la réalité.

« Au cours de mes recherches sur le trouble de stress post-traumatique, j’ai compris que ceux qui en souffrent peuvent avoir des réactions trop minimes à de gros événements et, à l’opposé, des réponses excessives à des incidents banals. Des réflexes tout autant psychologiques que physiques. À ce sujet, le libre The Body Keeps the Score, de Bessel van der Kolk, m’a beaucoup aidé. C’est quelque chose de très primal, finalement », analyse le comédien.

Le silence des hommes

Cette incapacité à communiquer de la gent masculine n’est cependant pas l’apanage des anciens combattants. On a inculqué à des générations d’hommes que la virilité et la vulnérabilité étaient incompatibles, et que demander de l’aide était un signe de faiblesse.

« Julie pose plein de questions à Marc, sur ce qu’il a vu en Afghanistan, ce qu’il a fait au combat, par exemple. Elle est curieuse, elle va vers l’autre, alors que les personnages de Marc et de son père sont incapables de le faire, explique Sophie Desmarais. Ce que j’aime du film, c’est que plutôt que de les élever en héros, on montre qu’ils ont de la misère, qu’ils en arrachent. Mais même s’ils n’arrivent pas à se le dire, on sent qu’ils s’aiment. »

Cette illustration d’une communication morcelée et d’une affection tue entre hommes confère à La Switch une portée universelle, qui va bien au-delà des impacts funestes de la guerre sur ceux qui ont été déployés.

« C’est vrai que, dans la société, les femmes sont victimes de la masculinité toxique. Mais les hommes eux-mêmes en sont, je pense, les premières victimes. Ça métastase, ça devient un cancer qui est transmis de génération en génération. Et, évidemment, quand tout ce qu’on connaît comme moyen de s’exprimer, c’est la rage, c’est de cette façon que ça sort, avec violence », explique François Arnaud.

La Switch, de Michel Kandinsky, est en salle depuis le 11 novembre 2022 et sera également disponible sur la plateforme Crave à compter du 13 novembre 2022.

Pour toutes les infos, c’est ici.

Texte : Karine Tessier

Après avoir été projeté en première mondiale au dernier Festival international du film sur l’art à Montréal, le documentaire Libre d’Hélène Bélanger-Martin sort en salles au Québec. Dans ce neuvième film, la cinéaste suit pendant un an le sculpteur et peintre André Desjardins dans la réalisation d’une œuvre colossale. Un moyen métrage intimiste, qui révèle toute la beauté de la création et des liens humains tissés grâce à elle.

Libre, c’est également le nom d’un personnage sculpté par André Desjardins, un être, comme l’explique son créateur, ancré dans le moment présent. Un an après la naissance de cet homme de bronze aux traits sereins, l’artiste décide d’en faire une version monumentale, de deux fois la taille d’une personne, un format qui révèlera encore davantage la puissance tranquille de l’œuvre. Il se donne un an pour accomplir sa besogne.

C’est cette aventure artistique, mais aussi humaine qui est illustrée par le film d’Hélène Bélanger-Martin. Un processus qui n’est pas dépourvu de rationalité, découpé en de multiples étapes, toutes cruciales et nécessitant une patience sans faille. De la numérisation des croquis à l’installation sur les berges du lac Memphrémagog, en passant par l’impression en 3D d’une armature et la correction d’erreurs de proportions, chaque instant fascine.

Les scènes dans lesquelles André Desjardins réfléchit, scrute, façonne, polit, retouche son personnage sont magnifiques dans leur simplicité. Dépouillées de tout artifice, ces séquences sont entrecoupées de plans de la nature québécoise dans ce qu’elle a de plus beau à offrir. Quelques mélodies minimalistes signées Nicolas Marquis se greffent à l’ensemble et ajoutent à l’état méditatif dans lequel nous plonge Libre.

On ne peut qu’être impressionné par le talent de l’artiste, un sculpteur et peintre autodidacte, passionné depuis l’enfance par la construction, le design et l’art. On est tout autant touché par ses souvenirs de jeunesse, souvent heureux, mais parfois tragiques, et les confidences d’un de ses plus fidèles amis et de collectionneurs dévoués.

Pas étonnant qu’Hélène Bélanger-Martin ait su aussi bien nous présenter l’artiste et l’homme qu’est André Desjardins. D’abord, il est son conjoint depuis de nombreuses années. Ils se connaissent par cœur. Mais la cinéaste est également une passionnée d’art, tellement qu’elle a ouvert la Galerie Roccia, à Magog, il y a maintenant plus de 10 ans. Son amour indéfectible pour la création visuelle se remarque tout autant dans sa filmographie, dans laquelle on retrouve de multiples courts métrages documentaires consacrés aux artistes et à leurs méthodes de travail.

Pour André Desjardins, créer, c’est le bonheur. On ne pourrait être plus d’accord. En assistant à la naissance de son œuvre plus grande que nature dans Libre, on se sent privilégié, ému, avec un désir renouvelé de découvrir le travail de nos artistes québécois.

Libre d’Hélène Bélanger-Martin est présenté du 13 au 19 avril à la Cinémathèque québécoise de Montréal, puis en tournée partout dans la Belle Province. Pour les dates, on consulte le site d’André Desjardins ici.

Pour voir la bande-annonce du documentaire, c’est ici.

Pour visionner gratuitement certains des films d’Hélène Bélanger-Martin, notamment Émotionnisme et Devenir, qui mettent aussi en vedette André Desjardins, c’est ici.

Pour en savoir plus sur la Galerie Roccia, c’est ici.

Texte : Karine Tessier

Alors que la douceur du printemps nous remonte le moral et que les mesures sanitaires liées à la COVID-19 s’allègent, la 38e édition du Festival international de cinéma Vues d’Afrique de Montréal bat son plein! Pour son retour en salles, l’événement propose, du 1er au 10 avril, 118 films produits par 44 pays, dont 30 % ont été réalisés par des femmes. C’est donc un rendez-vous à la Cinémathèque québécoise, pour savourer des courts, moyens et longs métrages, de la fiction, des documentaires et des œuvres d’animation. Entre deux projections, on fait un détour par Le Baobar, le temps de prendre un verre, assister à un spectacle de musique ou d’humour et déguster la poutine africaine créée par le chef Edmond, du restaurant et traiteur Diolo.

Fragments Urbains a vu, pour vous…

Ayam

En arabe, « ayam » signifie « des jours ». Dans ce superbe court métrage signé par la Marocaine Sofia El Khyari, on suit les préparations pour la fête de l’Aïd al-Adha, la plus importante célébration dans la religion musulmane. Tout en faisant la cuisine, trois générations de femmes se racontent : la volonté de la grand-mère d’apprendre à lire et à écrire, à une époque où c’était mal vu pour une jeune fille de fréquenter l’école, l’histoire d’amour avec le grand-père… Un récit de famille tissée serrée, de tradition et de résilience, illustré par des dessins aux riches coloris, couchés sur du papier kraft. Rien d’étonnant à ce que les films de cette créatrice de talent aient été récompensés dans de nombreux festivals, un peu partout sur la planète.

Présenté dans un programme de courts métrages, le 2 avril.

Autrement d’ici

Lénine Nankassa Boucal, d’origine sénégalaise, a choisi de s’établir à Rimouski, il y a plusieurs années. Aujourd’hui, il est coordonnateur du Cabaret de la diversité, qu’il a fondé, une initiative pour favoriser le vivre-ensemble dans cette municipalité du Bas-du-Fleuve. Dans ce moyen métrage, il se confie sur sa vie dans la Belle Province et nous présente deux de ses concitoyens, Shanti Park, de la Corée, et Moustapha Ndongo, du Sénégal. Avec son documentaire, le sympathique cinéaste souhaite montrer que les immigrants s’intéressent à la culture du Québec et que celui-ci est ouvert à l’intégration des nouveaux arrivants.

On est vite touchés par les confidences de Lénine, Shanti et Moustapha, qui ont trouvé ici de nouveaux amis, mais qui se sont surtout découvert de nouveaux talents et des forces insoupçonnées. Des propos empreints d’humour et de sagesse, illustrés par les magnifiques images de cette région de l’est de la province, signées Philippe Chaumette. À voir absolument.

Présenté le 2 avril.

Balalaïka

Sur le rythme de Kalinka d’Ivan Larionov, classique folk russe du 19e siècle, une femme vit de bien étranges hallucinations… après avoir dégusté un poulet rôti! On rigole franchement devant les expressions tantôt abasourdies, tantôt horrifiées de l’héroïne. Un très court film, à peine deux minutes, franchement réjouissant, réalisé par la talentueuse cinéaste et illustratrice égyptienne Maii Mohamed Abd Ellatif. On en aurait pris bien plus!

Présenté dans un programme de courts métrages, le 2 avril.

La Danse des béquilles

Chaque matin, Penda se rend à Dakar pour mendier, pour aider sa mère à faire vivre la famille. Assise dans son fauteuil roulant, les écouteurs sur les oreilles, elle ondule au rythme de la musique et sourit, exultant la joie de vivre. Rêvant de devenir danseuse professionnelle, elle voit dans sa rencontre avec un jeune chorégraphe la chance d’atteindre son objectif. Mais, pour ce faire, elle devra surmonter bien des obstacles, notamment son handicap et l’attitude autoritaire de sa mère, autrefois elle-même artiste.

Ce court métrage du Sénégalais Yoro Niang est une histoire d’amour… pour la danse, narrée au son des tambours et de la kora. On y constate la puissance de l’art dans l’émancipation d’une femme victime de préjugés, tout autant que dans la réconciliation des membres d’une famille brisée.

Dans les rôles de Penda et de sa mère, Dème Coumba et Mbaye Awa sont sublimes. Ces grandes interprètes nous livrent des personnages complexes, parfois durs, mais qui irradient la grâce et la beauté. Mentionnons que la musique du film a été composée par Didier Awadi, membre fondateur du groupe hip-hop Positive Black Soul, bien connu des Montréalais.

Présenté le 2 avril.

Bande-annonce ici.

Dans les mains de Dieu

Quand Samir, qui travaille dans une boutique d’électronique, a besoin de repos, il oublie son téléphone et va marcher dans le désert marocain. Cette fois, il part à la recherche de son pote Saïd, sans garantie de le retrouver. Sur le chemin, il fait des rencontres, raconte de savoureuses anecdotes de tournage, se confie sur ses maints échecs professionnels et se livre à l’introspection.

Le réalisateur Mohamed Rida Gueznai a tourné son premier film à l’âge tendre de 12 ans, avec pour tout équipement un téléphone portable. Lauréat, en 2019, de plusieurs prix pour son court métrage documentaire Le Vieil Homme et la montagne, présenté dans 24 pays, il récidive avec un excellent premier long métrage, Dans les mains de Dieu, un road movie avec, comme vedette, un homme au cœur d’or et à l’esprit bohème, nostalgique d’un temps où les gens ne dépendaient pas des nouvelles technologies. Le cinéaste, aidé de son collègue Mohamed Reda Kouzi, signe une direction photo spectaculaire, qui sublime les beautés du pays de l’Afrique du Nord. Un artiste à surveiller.

Présenté le 2 avril.

Pour toutes les informations, c’est ici.

CRITIQUE DU FILM QUARTIERS SOUS TENSION, DE CAROLE LAGANIÈRE

Texte : Véronique Bonacorsi

Comment le petit café branché du coin ou la venue d’artistes dans un quartier considéré si peu cool il n’y a pas si longtemps peuvent-ils être reliés à l’exode forcé des habitants d’origine? Ces éléments représenteraient des symptômes de la gentrification. La documentariste Carole Laganière examine dans son dernier film, Quartiers sous tension, diffusé cette semaine à ICI Radio-Canada Télé, puis sur la plate-forme ICI Tou.tv, ce phénomène social et économique qui s’attaque aujourd’hui à sa ville natale de Montréal.

Rosemont-La Petite-Patrie, Hochelaga-Maisonneuve, Parc-Extension… L’embourgeoisement progressif de nombre d’arrondissements montréalais présente autant d’acteurs que de victimes. Alors que divers projets immobiliers hors de prix pour la population locale font leur apparition, de nouveaux entrepreneurs ouvrent des commerces au goût du jour, insufflant une revitalisation du quartier.

Quartiers sous Tension_BA from Laganière, Carole on Vimeo.

Avec Quartiers sous tension, Carole Laganière, qui a scénarisé et réalisé ce documentaire, dresse un portrait diversifié d’une transformation urbaine, à laquelle se retrouvent aussi confrontés les autres grands centres du monde, tels que Buenos Aires, Londres et Paris. À travers les témoignages de différents participants ou spectateurs, actifs ou impuissants, le discours entourant la gentrification se nuance.

Les uns connaissent la violence d’être expulsés de leur maison d’enfance. Les autres subissent du vandalisme sur leur boutique. Certains accueillent avec joie les jeunes familles dans leur voisinage. D’autres déplorent la tendance individualiste que symbolisent les condos. Mais tous ces groupes doivent-ils forcément s’opposer? Peut-être existe-t-il un moyen pour que ce désir de changement pour une ville meilleure ne se fasse pas au détriment des plus vulnérables…

Vous pourrez regarder le film Quartiers sous tension à ICI Radio-Canada Télé, le samedi 12 août à 21 h, dans le cadre de l’émission 1001 VIES. Le documentaire sera ensuite disponible sur la plate-forme ICI Tou.tv.

En attendant, vivez l’expérience interactive Gentriville, compagne du long métrage. Vous pourrez y visiter plusieurs quartiers de Montréal, mais également de Vancouver, de Paris, de Buenos Aires et de Londres. Vous irez à la rencontre de chercheurs, de militants, de résidents et de commerçants. Enfin, vous découvrirez votre profil dans l’échelle de la gentrification : ici.radio-canada.ca/gentriville

Page Facebook officielle du film Quartiers sous tension : www.facebook.com/QuartiersSousTension

Page Facebook officielle de l’expérience interactive Gentriville : www.facebook.com/Gentriville

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CRITIQUE DU FILM ROBERT DOISNEAU, LE RÉVOLTÉ DU MERVEILLEUX, DE CLÉMENTINE DEROUDILLE

Texte : Catherine Gignac

Le Baiser de l’hôtel de ville, de Robert Doisneau (1950).

Une femme. Un homme qui la serre contre lui, amoureux. Un baiser. Et des gens indifférents et pressés au beau milieu de Paris. Ce cliché en noir et blanc a fait le tour du monde. Il est aussi celui qui m’a fait connaître le grand photographe français Robert Doisneau. Tout de suite, j’en suis tombée amoureuse. Doisneau, un nom qui rappelle les oiseaux,  un nom discret. Doisneau qui s’immisce dans la foule et se pose, photographie les gens dans leur quotidien, capture des moments de tendresse et d’amitié. Doisneau qui immortalise la vie urbaine dans toute sa beauté et sa laideur. Rendre le quotidien poétique, c’est ce qu’aura réussi ce grand artiste au cours de sa carrière.

Clémentine Deroudille, la petite-fille de Robert Doisneau, porte à l’écran la vie de celui qui est rapidement devenu l’un des plus célèbres photographes au monde. Dans son film Robert Doisneau, le révolté du merveilleux, elle dresse un portrait juste et émouvant de son grand-père. Clémentine Deroudille est la réalisatrice, mais aussi la scénariste et la narratrice du documentaire.  À travers des archives inédites, elle nous fait revivre la vie familiale et professionnelle de l’artiste.  Elle raconte comment ce dernier porte malgré lui, grâce à ses photographies, l’essence même d’une époque. « Partout où il peut rencontrer du monde, ça donne des photos », nous dit-elle.

Robert Doisneau à New York en 1960.

Dans ce documentaire, celui qui n’a fait que photographier des gens toute sa vie et qui s’est toujours posé en observateur se retrouve sous les projecteurs.  On s’intéresse à la personnalité de Doisneau, à son intimité, ses amitiés, sa jeunesse, ses motivations profondes.  On revisite son œuvre, sa vie, de sa naissance en 1912 à sa mort en 1997. On s’immisce dans son environnement, on fait la connaissance de ses amis proches. Ses amis, c’était le poète Jacques Prévert, l’écrivain Daniel Pennac, la photographe Sabine Weiss, pour ne nommer que ceux-là.

90 ans de Baba, Chatillon-sous-Bagneux février 1980, de Robert Doisneau.

Clémentine Deroudille livre une narration juste et pertinente, poétique même, qui rend justice à l’œuvre de son grand-père. Elle la parsème de réflexions sur l’art et sur la vie. La photographie y est d’ailleurs décrite comme une lutte perdue d’avance avec le temps qui file. C’est un art qui flirte avec la mort, puisque l’œuvre photographique appartient au passé dès l’instant où elle naît.

Argenteuil Cité champagne 1984, de Robert Doisneau.

La vie de Doisneau est une inspiration pour tous ceux qui ont des rêves. Alors qu’il s’est fait licencier des Industries Renault où il exerçait le métier de photographe, il a lancé sa carrière de manière indépendante, et c’est à ce moment qu’il a créé ses plus belles œuvres et qu’il s’est fait connaître.  Selon Doisneau, pour exercer le métier de photographe, il faut être curieux, désobéissant et avoir une patience de pêcheur à la ligne.

New York mars 1966, de Robert Doisneau.

Aux curieux, aux désobéissants, aux rêveurs, je recommande ce film. Peut-être vous reconnaîtrez-vous dans cette célèbre réplique du photographe : « Dans le fond, j’essaie peut-être de faire ma photo pour ne pas mourir. »

Robert Doisneau, le révolté du merveilleux, de Clémentine Deroudille, sort en salles au Québec le 19 mai 2017.

Site Web officiel du film : funfilm.ca/fr/films/robertdoisneau

Site Web officiel du photographe Robert Doisneau : www.robert-doisneau.com

ROBERT DOISNEAU, LE RÉVOLTÉ DU MERVEILLEUX- la bande-annonce (en salle le 19 mai) from Funfilmdistribution on Vimeo.

Texte : Audrwey A.

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Du mannequinat au cinéma, en passant par la case météo dans l’émission Le Grand Journal de Canal +, Charlotte Le Bon a su laisser son « empreinte » sur le petit et le grand écran en côtoyant de grands personnages. Elle a eu notamment l’occasion de « travailler » au côté d’Astérix devant la caméra de Laurent Tirard, se faire habiller par le Yves Saint Laurent de Jalil Lespert et prêter sa voix à Joie dans Vice-Versa.

Depuis le mois de septembre et jusqu’au 10 novembre prochain, c’est dans le troisième arrondissement parisien qu’on la retrouve à la Galerie Cinéma, pour sa première exposition intitulée One Bedroom Hotel on the Moon.

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À travers ses créations pleines d’humour, elle invite le public à venir découvrir son univers éclectique et poétique, où ses illustrations prennent vie sous les traits d’H.H. l’homme à la tête de cœur, de petites crottes devant lesquelles on ne peut s’empêcher de sourire, de peaux de banane, d’un monstre poilu et de petits mots « pour dire simplement de grandes choses ».

Après Charlotte Le Bon actrice et Charlotte Le Bon illustratrice, le public peut également faire connaissance, dans la salle de projection de la galerie, avec Charlotte Le Bon réalisatrice grâce à la bande-annonce de son court métrage Modern Monster tourné durant l’été 2015.

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L’exposition One Bedroom Hotel on the Moon de Charlotte Le Bon est présentée jusqu’au 10 novembre 2016 à la Galerie Cinéma.

Site Web officiel de la galerie : galerie-cinema.com

Site Web officiel de Charlotte Le Bon : www.lebonlebon.com