Archives de la catégorie ‘Théâtre et danse’

Texte : Karine Tessier

Photo : Richmond Lam.

Dans Les Glaces, on suit une femme qui accuse un ancien amoureux de jeunesse de l’avoir agressée sexuellement, il y a 25 ans, ainsi que les conséquences de cette dénonciation sur la famille de l’assaillant. Avec sa nouvelle pièce, la prolifique dramaturge Rébecca Déraspe explore les thèmes de l’imputabilité, du pardon et de la solidarité. Cette coproduction du Théâtre de La Manufacture et du Théâtre La Bordée est mise en scène par Maryse Lapierre, et met en vedette notamment Christian Michaud, Daniel Gadouas et Debbie Lynch-White. À quelques jours de la première représentation au Théâtre La Licorne, dans la métropole, Fragments Urbains s’est entretenu avec l’autrice pour en apprendre davantage sur le processus de création du spectacle et discuter de bienveillance et de responsabilité.

Quelle est la genèse du projet Les Glaces? Quelle a été votre principale source d’inspiration?

Dans tout le premier mouvement de dénonciation, il y a quatre ou cinq ans, j’avais envie de trouver ma façon de prendre part à ce débat-là. Et je suis extrêmement nulle pour débattre, dans la vie! Ma façon de réfléchir et de me poser des questions sur l’être humain, de comprendre quelque chose du monde, en général, c’est d’écrire du théâtre.

La vie a fait en sorte que j’ai mis un peu le projet sur pause. Puis, il y a un an, j’ai eu une résidence d’écriture à Bibliothèque et Archives nationales du Québec, en association avec le Centre des auteurs dramatiques. J’avais alors accès à ce que je voulais comme archives. J’ai fait énormément de lecture de correspondances amoureuses, pour voir comment le désir s’exprimait à travers les époques. Et, à un moment donné, je suis tombée sur le discours d’ouverture de la Fédération nationale Saint-Jean-Baptiste, la première fédération féministe québécoise, de Marie Gérin-Lajoie. C’était en 1907. Dans son allocution, elle parle de solidarité féminine, de sororité, de l’importance de l’éducation dans toutes les questions d’ordre sexuel.

Ç’a été comme une révélation. À l’heure actuelle, certains affirment que le débat sur la violence sexuelle est un effet de mode. Non, ça fait des centaines d’années qu’on essaie d’en parler, que ce sujet-là tente d’exister! Si on en parlait déjà au début des années 1900 et qu’on n’a autant pas avancé, qu’est-ce que ça veut dire pour notre avenir?

Lorsque j’ai repris mon travail, ça a changé un peu l’axe dramaturgique de mon texte. C’est-à-dire que, il y a cinq ans, j’étais plus proche des deux garçons qui ont posé un geste de violence sexuelle. Et là, j’ai modifié ma perspective et je me suis davantage rapprochée des personnages féminins, pour créer un espace de solidarité féminine qui traverse la pièce. Et il y a énormément de moi aussi, dans ce spectacle-là. De toute façon, je pense que, chaque fois que quelqu’un écrit, c’est pour essayer de réparer quelque chose. Du moins, c’est mon cas.

Dans la pièce, on suit les protagonistes dans le présent, mais également il y a 25 ans. C’était essentiel pour vous, ce retour dans le passé?

Oui, tout à fait! On ne lisait pas les événements de la même façon, il y a 25 ans. Si ces hommes-là avaient posé ce geste de violence sexuelle il y a six mois, on n’aurait pas d’empathie pour eux. Mais, avec le recul et parce qu’eux-mêmes regardent l’adolescent qu’ils étaient… En tout cas, moi, ma porte d’humanité et de bienveillance est plus facile à ouvrir. Le rapport au temps est très important parce que, sinon, je n’aurais pas pu aborder ces personnages-là avec le respect que j’ai pour eux.

Ça me confronte beaucoup, comme être humain, de revisiter ce que j’ai vécu, ce que mes amis ont vécu. Il y a une introspection qui s’opère, inévitablement. Personnellement, je regarde des épisodes de mon passé et je peux vraiment dire : ah, mon Dieu, cette fois-là, j’ai dépassé une limite ou, cette fois-là, je n’ai pas mis ma limite! Les dernières années m’ont permis de comprendre que j’avais le droit de dire non et je ne me donnais pas nécessairement la permission de le faire, avant.

Voilà pourquoi j’avais envie de raconter une histoire qui s’est passée il y a longtemps, pour que les protagonistes soient capables d’avoir une distance, même émotive. Ils ont tout mis dans des glaces et ça va dégeler, au cours de la pièce.

Rébecca Déraspe. Photo : Harrison Rupnik.

Vous abordez souvent des thèmes graves, mais toujours dans la nuance et la bienveillance. Jamais vous ne jugez les personnages, jamais vous ne les condamnez.

Dans mon rapport à l’écriture, j’ai besoin d’être en contact avec des êtres humains, qui sont complexes. Ce n’est jamais tout noir ou tout blanc, c’est toujours nuancé. C’est d’autant plus important avec un sujet comme celui des Glaces. C’est facile de condamner, mais je n’avais pas envie de le faire. Évidemment, il ne faut pas tomber dans l’impunité non plus, mais juste condamner, ça ne règle pas le problème.

Vous ne prétendez pas, avec votre spectacle, apporter de solution au fléau de la violence sexuelle. Votre contribution au débat se situe plutôt dans la réflexion, la discussion.

Je suis juste une petite fille de 39 ans, qui n’a pas les ressources pour dire ce qu’il faut faire. Je veux plutôt qu’on se demande : qu’est-ce qu’on doit faire de plus, en tant que société? Je souhaite qu’on réfléchisse tous ensemble, en assumant le fait qu’on est des êtres humains qui essaient de comprendre un enjeu.

Il y a également le thème de la famille qui est omniprésent dans la pièce. Quelqu’un qui a posé un geste répréhensible est aussi un fils, un frère, un conjoint… Son entourage est également victime collatérale des conséquences de son acte.

Complètement! Comment on fait pour continuer d’aimer quelqu’un qui a fait quelque chose avec lequel on est viscéralement en désaccord? Moi, je pense que si la personne a le courage d’assumer les conséquences de son geste et le désir de réparer quelque chose, il y a une piste de réflexion à explorer.

Lorsqu’on aborde un sujet aussi délicat que la violence sexuelle, est-ce qu’on travaille d’une manière différente avec les comédiens masculins et féminins?

On a une équipe incroyable et généreuse. Ça a amené des conversations très sensibles. Je sens les hommes extrêmement touchés par mon texte. Et, chaque fois qu’il y a un enchaînement, tous les hommes présents pleurent. J’essaie de comprendre pourquoi ça les bouleverse à ce point. Est-ce qu’ils revisitent certains souvenirs dans leur tête? J’extrapole, mais je ne suis pas nécessairement capable de mettre des mots sur la réaction des comédiens. Ce qui est sûr, c’est que l’équipe est composée de sensibilités bienveillantes et que les artistes apprennent beaucoup au contact de cette matière.

Quel impact souhaitez-vous que le spectacle ait sur le public?

J’ai vraiment envie que le spectateur sorte avec le désir de discuter, le courage de revisiter sa propre histoire, le courage de la solidarité concrète. J’ai l’impression qu’on est beaucoup dans les discours. Il y a des réflexes qui sont extrêmement ancrés en nous. Et, parfois, et je vais parler pour moi, le concret ne suit pas toujours le discours, notamment dans l’intimité des relations. Si une amie te confie quelque chose, auras-tu les mains tendues? Tes idéaux, est-ce que tu les incarnes tout le temps? Appliquer sa vision du monde au quotidien, c’est ça, le défi. Ça m’a fait prendre conscience de l’ampleur du courage que ça demande.

Je me questionne sur les espaces de solidarité, également. Je pense entre autres au documentaire T’as juste à porter plainte, de Léa Clermont-Dion, qui est vraiment incroyable. Elle montre à quel point c’est difficile pour la victime, qui devient aussi une suspecte aux yeux de certains et dans la salle d’audience. C’est ça aussi qui doit changer. C’est ce que j’essaie de dire, dans le spectacle. On a une responsabilité collective, notamment dans l’éducation de nos enfants. Il y a une piste de solution pour l’avenir dans tout ça.

Quel est le plus grand défi que vous avez dû surmonter dans la création de la pièce?

On est tous hyper conscients du sujet, de l’impact que ça peut avoir, de façon positive ou négative. Est-ce qu’on en parle de la bonne façon? Je n’ai vraiment pas envie d’être démagogique, d’être dans le tout noir ou tout blanc.

Je pense que, la clé, c’est de le faire pour les bonnes raisons, c’est-à-dire, à mon avis, pour essayer de comprendre ce qu’on doit faire, en tant que société.

Depuis la première vague du mouvement #MeToo, il y a eu de nombreux documentaires, fictions, prises de parole publiques sur le sujet de la violence sexuelle. Avez-vous craint, pendant le processus de création, que la population devienne un peu saturée à propos de ce sujet?

Bien sûr! Mais je pense que c’est un angle qu’on n’a pas nécessairement vu encore, dans les différentes productions. Et je pense que je raconte une bonne histoire, celle d’une famille. On évoque un point de saturation, un discours qui se poursuit dans l’espace public, mais rien ne se passe concrètement! Moi, mon outil, c’est le théâtre. C’est ma façon de mettre ma pierre dans l’édifice, de participer à la réflexion collective.

Les Glaces, de Rébecca Déraspe, mise en scène par Maryse Lapierre, est présentée du 4 octobre au 5 novembre 2022, au Théâtre La Licorne, à Montréal, puis du 23 au 26 novembre 2022, au Théâtre Alphonse-Desjardins, à Repentigny, le 1er décembre 2022 au Centre culturel Berger, à Rivière-du-Loup, et du 10 janvier au 4 février 2023 au Théâtre La Bordée, à Québec.

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Texte et photos : Karine Tessier

Photo : David Wong.

Rares sont les projets qui fusionnent les domaines de l’art et de la santé. Présenté à Tangente, dans l’Édifice Wilder, l’événement multidisciplinaire Les Jeux du crépuscule, dont la création et la direction artistique sont signées Ariane Boulet, se veut une réflexion aussi intime que grandiose sur notre rapport au vieillissement et à la maladie. En plaçant la danse au service de l’humain, l’artiste nous invite à explorer ces passages obligés de l’existence, pour les adoucir et, peut-être, les réinventer.

Une œuvre chorégraphique d’abord, mais également une exposition, des ateliers de coprésence, des discussions, un recueil de poèmes. Un bouquet d’activités, que le public peut découvrir en tout ou en partie et pendant lesquelles il est parfois invité à participer.

Photo : David Wong.

Le spectacle est le résultat de huit années de visites dans plus d’une vingtaine de CHSLD, avec le projet Mouvement de passage. Ariane Boulet et ses acolytes y ont côtoyé des dizaines de personnes âgées en perte d’autonomie ou en fin de vie, insufflant dans leur quotidien souvent difficile un brin de magie. Ils ont égayé les chambres, les espaces communs et même les couloirs des établissements de soin et ont permis aux aînés de s’exprimer, d’interagir, de stimuler leur créativité, de se raconter à travers les gestes et la musique, sans même prononcer un mot. Les résidents ont tissé des relations avec l’autre, un défi immense, dont la réalisation est facilitée par l’intervention de l’art.

Ce sont toutes ces expériences, à la fois banales et hors du commun, douloureuses et légères, tragiques et hilarantes, qui nous sont racontées par les talentueux interprètes des Jeux du crépuscule. Des souvenirs physiques, sensoriels et émotifs, témoins de transformations personnelles résultant du vieillissement et de la maladie. Une dame qui offre à une danseuse une visite guidée de sa chambre, comme si la pièce exiguë tenait davantage d’un majestueux château. Une résidente à l’âme séductrice qui caresse sensuellement le bras d’un artiste, l’œil coquin. Un vieillard malentendant qui « écoute » la mélodie en ressentant les vibrations qui émanent du sol. Une femme atteinte de démence qui, chaque jour, « attend l’autobus » devant la porte de l’ascenseur.

Il émane de l’œuvre d’Ariane Boulet une bienveillance et une tendresse touchantes, un profond respect pour les aînés rencontrés et leurs vies si riches. Sans taire la souffrance,  la créatrice et ses complices proposent au public de focaliser sur l’apport des personnes âgées à notre société, leur générosité, leur humour, leurs 1 000 histoires. Le groupe nous assure qu’il y a, dans les CHSLD, lieux où les conditions de vie et de travail sont parfois pénibles, un « potentiel de party à chaque coin de couloir ».

Photo : David Wong.

Cette sensibilité à fleur de peau, couplée à des habiletés techniques certaines, fait d’Audrey Bergeron, Lucy M. May, Isabelle Poirier, David Rancourt, Georges-Nicolas Tremblay et Julie Tymchuk de grands interprètes. Charismatiques, ils nous offrent un récit qu’on savoure doucement et qui nous fait tantôt rire à gorge déployée, tantôt s’essuyer une larme furtive sur la joue. Si la chorégraphie nous émeut autant, c’est aussi parce qu’elle nous confronte à notre propre fragilité, au caractère inéluctable de la maladie et de la mort.

Photo : David Wong.

Pour accompagner les mouvements fascinants des danseurs, la voix et les mélodies sublimes de Marie Vallée, qui signe la direction musicale, la composition et l’interprétation de la bande sonore des Jeux du crépuscule. La performance de l’artiste sur et aux abords de la scène, plutôt que l’utilisation de pistes préenregistrées, ajoute à l’ensemble une intensité captivante.

On quitte la salle chaviré, avec en main un petit poème d’Ouanessa Younsi, autrice et psychiatre, ainsi qu’une semence de fleur de calendule, symbole du cycle de la vie. De petites attentions qui permettront à l’œuvre d’Ariane Boulet de nous accompagner encore plus longtemps dans le temps.

Bande-annonce ici.

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Atelier : Rencontre avec la technologie de la présence.

Juste avant la représentation, on a eu le privilège d’assister à une des activités inspirées par les recherches des scientifiques Stefanie Blain-Moraes et Naila Kuhlmann. Un petit capteur attaché à notre doigt, pour enregistrer les données de notre système nerveux, on s’est laissé guider par les directives de l’animateur Marco Pronovost. Après quelques profondes respirations, on a été invité à explorer et développer une connexion avec un autre participant à l’atelier, en improvisant des mouvements. Puis, les chercheuses ont analysé les chiffres recueillis, en plus de nous en dire davantage sur leurs travaux. Passionnantes, leurs études ont notamment permis d’observer chez des patients atteints de démence des réactions physiques à l’autre, comme si le corps conservait des souvenirs de rencontres passées que l’esprit a oubliées.

Pour en apprendre plus, c’est ici.

Exposition de Marie-Hélène Bellavance

Lors de ses ateliers créatifs donnés en CHSLD, l’artiste visuelle propose aux résidents et à leurs proches aidants de fabriquer de petites maisons à souvenirs, remplies de fragments de leur histoire personnelle. Avec ce projet intitulé La Maison que j’habite, moi, elle aide les aînés, souvent isolés, déracinés, encore davantage pendant la pandémie de COVID-19, à prendre conscience que leur maison est avant tout à l’intérieur d’eux-mêmes et qu’il est toujours possible de s’y réfugier. Dans l’exposition présentée en accompagnement aux Jeux du crépuscule d’Ariane Boulet, Marie-Hélène Bellavance propose au public les créations des personnes âgées avec qui elle a travaillé, mais aussi ses propres peintures et installations, délicates et précieuses, qui reprennent les thèmes qui l’inspirent depuis ses débuts, soit la vie, la mort, la transformation et la résilience.

L’événement artistique Les Jeux du crépuscule d’Ariane Boulet a été présenté du 28 avril au 1er mai 2022 à Tangente, à l’Édifice Wilder, à Montréal.

Texte : Karine Tessier

Photo : Emily Gan / Danse-Cité.

VEGA, la nouvelle création du chorégraphe et directeur artistique Emmanuel Jouthe, une coproduction de sa troupe Danse Carpe Diem et de Danse-Cité, tient son nom de l’étoile la plus étincelante dans le ciel d’été. Dans cette œuvre, quatre danseurs évoluent, se métamorphosent, tissent et brisent des liens, dans un perpétuel mouvement circulaire. Ils composent une constellation d’astres dont la brillance ne peut être ignorée, mais qui demeurent un mystère à élucider. Avec ce ballet cosmique, l’artiste se questionne sur l’impermanence de l’identité individuelle et collective et pose la question : connaît-on vraiment les gens que nous côtoyons?

Dès les premiers instants du spectacle, les interprètes Élise Bergeron, Rosie Constant, James Phillips et Marilyne St-Sauveur tracent des figures rondes sur les planches immaculées, sous une auréole lumineuse qui fait office de soleil. Ils battent la cadence à l’unisson, le visage quasi imperturbable, simplement rougi par l’effort, sans se toucher ni même prendre conscience de l’existence de l’autre. Puis, au fil des déplacements rotatifs, ils prennent leur envol, s’affirment dans leur unicité, s’attirent et se repoussent. Étoiles ou humains, leur trajectoire de vie est parsemée de rencontres avec des acolytes qu’ils croisent, imitent, soutiennent, abandonnent. Entre ces brèves réunions, les danseurs mettent et enlèvent des accessoires et des pièces de vêtements disposés tout autour de la scène. Leur personnalité se moule à ces costumes. Certaines étoffes briment la liberté d’esquisser des gestes, alors que les chaussures modifient la façon de se mouvoir dans l’espace.

Photo : Emily Gan / Danse-Cité.

En créant cette danse, Emmanuel Jouthe a voulu rendre concret l’espace occupé par l’imaginaire humain. Le public se laisse rapidement prendre au jeu de cette multitude de circonvolutions, rêvant à 1 000 histoires, visitant avec les personnages des territoires jusqu’alors inexplorés et qu’on tente désespérément de défricher, tout en conservant un port d’attache, lien rassurant dans l’univers de tous les possibles. Le travail minimaliste d’Antoine Berthiaume, à la composition musicale, et de Paul Chambers, à la conception des éclairages, accompagne parfaitement ce rituel hypnotique, accompli par des interprètes de talent, qui s’abandonnent volontiers à cette valse étourdissante.

Photo : Emily Gan / Danse-Cité.

VEGA est une œuvre déstabilisante, bouleversante autant par son étrangeté que par sa portée universelle. Au fur et à mesure que les mutations surviennent, les protagonistes sont personne et tout le monde à la fois, déchirés entre l’envie de se faire voir, de se faire reconnaître, et le désir d’anonymat. Seuls ensemble, ils mènent une quête identitaire aussi grisante qu’anxiogène. Quatre êtres réduits au silence, qui évoluent pourtant dans un espace densément peuplé, une image qui trouve écho dans notre société où les fractions sociales pullulent. Avec sa dernière proposition, le chorégraphe et directeur artistique prouve encore une fois qu’il sait reproduire avec justesse sur scène les tourments de l’âme humaine et les complexes rapports qui nous unissent.

VEGA, d’Emmanuel Jouthe, a été présentée au Théâtre Rouge du Conservatoire, à Montréal, du 25 au 28 novembre 2021.

Bande-annonce de VEGA, c’est ici.

Pour plus d’informations sur Emmanuel Jouthe, c’est ici.

ENTREVUE AVEC DAVE JENNISS, AUTEUR ET METTEUR EN SCÈNE

Texte : Karine Tessier

Dans sa toute dernière pièce, Nmihtaqs Sqotewamqol / La Cendre de ses os, l’auteur, metteur en scène et comédien Dave Jenniss explore à nouveau des thèmes qui lui sont chers, tels le territoire, l’identité et l’héritage. Cette fois, c’est en racontant l’histoire des deux frères Kaktanish, qui réagissent de manière bien différente au décès de leur père, survenu trois ans plus tôt. On s’est entretenu avec l’artiste, qui est également directeur artistique des Productions Ondinnok, première compagnie de théâtre francophone autochtone au Canada, pour en apprendre davantage sur ses méthodes de travail, les projets qu’il aimerait réaliser, ainsi que de ses coups de cœur artistiques autochtones.

Photo : Myriam Baril Tessier.

Dans vos écrits, le thème de la transmission est omniprésent. L’importance de l’héritage pour vous explique-t-elle la nouvelle direction que prend votre carrière?

Je ne suis pas quelqu’un qui aime être à l’avant de la scène. Je l’ai déjà été à l’époque où j’étais acteur. Depuis trois ou quatre ans, depuis que j’ai pris la direction d’Ondinnok, j’ai le goût de plonger dans la mise en scène, dans la direction d’acteurs, et j’aime vraiment ça. J’ai envie de transmettre ce que j’ai appris aux côtés d’Yves Sioui Durand et Catherine Joncas, depuis que je suis arrivé à la compagnie, en 2004. Présentement, je le fais avec mes acteurs qui ne connaissaient pas la troupe. Ils trouvent ça un peu difficile parce que j’ai une approche un peu plus organique, plus spirituelle aussi!

Il y a toujours un élément cérémonial dans votre façon de travailler. Vous brûlez de la sauge, il y a un petit rituel… Ces gestes ont toujours été présents dans votre processus de création?

C’est ce que j’ai appris chez Ondinnok et, pour moi, ça allait de soi que je devais continuer là-dedans. Même si je fais du théâtre un peu plus contemporain, il y a toujours ce côté mythologique à l’intérieur de moi. C’est ma base. C’est pour ça qu’à chaque fois que je fais un atelier, une mise en scène ou que j’écris un texte, il y a des moments où on plonge dans une espèce de monde renversé, un monde imaginaire où on est du côté plus spirituel. Il y a une lenteur également que j’ai apportée, que je trouvais intéressante.

Cette solennité, cette envie de prendre le temps sont à mille lieues de la société de performance dans laquelle nous vivons. Comment les comédiens ont-ils réagi face à cette approche?

Ç’a été un beau défi! Prendre le temps de prendre le temps… Je l’ai dit souvent, souvent, souvent, depuis le début des répétitions : « Vous allez trop vite. Prenez votre temps, il n’y a rien qui presse. » C’est une espèce de contre-théâtre un peu, ce que j’ai essayé de faire avec Nmihtaqs Sqotewamqol / La Cendre de ses os, c’est essayer justement de pas être dans la performance. C’est quelque chose que j’ai appris chez Ondinnok, être juste là, être vrai et se laisser transporter par les mots! Souvent, on n’est pas obligé de jouer énorme, surtout dans une salle comme La Petite Licorne!

Photo : Myriam Baril Tessier.

Parce que les spectateurs, même ceux assis tout au fond, voient les expressions faciales, chaque petit geste.

Oui, c’est ça! Tout le monde a été quand même assez ouvert. Il y a des gens avec qui j’avais déjà travaillé, comme Charles Bender, chez Ondinnok. Mais, les autres, ça leur faisait du bien, ainsi que l’absence totale de jugement. Ça fait partie des pierres fondatrices de la compagnie : ne jamais se juger, ne jamais juger l’autre. On a la chance d’avoir un aîné anichinabé avec nous, qui joue, Roger Wylde. Il amène un calme, une sérénité, et on le ressent même dans le spectacle.

Vous êtes directeur artistique de la troupe depuis maintenant quatre ans et demi. Comment voyez-vous ce nouveau rôle de patron?

Je suis, je pense, davantage un ami qui est là pour faire avancer la compagnie avec toute l’équipe. On fait des retraites de groupe, quatre par année. À ce moment, on se retire trois ou quatre jours et on fait des exercices, des ateliers, de la méditation. Et on essaie de trouver les meilleures choses pour faire progression, évoluer Ondinnok.

Quels seraient vos souhaits pour l’avenir de la troupe?

Depuis quelque temps, on est dans une phase de théâtre un peu plus parlé, un peu plus contemporain, notamment avec L’Enclos de Wabush, coproduit avec le Nouveau Théâtre Expérimental, et Nmihtaqs Sqotewamqol / La Cendre de ses os à La Licorne. Juste avant de fermer les bureaux pour la période estivale, j’ai eu une rencontre avec la direction générale, avec les mentors, Yves et Catherine, et j’ai beaucoup parlé de mon désir de revenir à l’ancien Ondinnok, donc un théâtre plus organique, peut-être moins verbeux, plus dans le corps, dans le physique, dans les histoires du passé, dans le lien avec le territoire. J’ai le goût de plonger dans quelque chose comme ça pour les prochaines œuvres.

Photo : Myriam Baril Tessier.

Qu’est-ce que le corps, le mouvement, le silence permettent que les mots ne permettent pas?

Quand les silences sont vraiment là, sont vraiment habités, qu’ils sont faits avec sincérité, qu’on ne les plaque pas avec un jeu d’acteur, je trouve qu’ils sont souvent plus puissants que les mots qui sont dits. J’ai coupé du texte justement en répétition. Tout ce qu’on a décidé de faire, avec mon assistante-metteuse en scène Édith Paquet, c’est une espèce de contre-balancement du jeu. Si on se déplace, on se déplace pour la bonne raison.

D’ailleurs, la structure sur laquelle on joue, faite de bois, peut créer un certain handicap. J’avais ce désir d’une scénographie dans laquelle les acteurs se promènent et se sentent un peu pris, à l’étroit, ce qui les oblige à bouger pour les bonnes raisons. Le déséquilibre leur demande d’ancrer leurs pieds comme des racines. Sans que ce soit joué comme une tragédie, leurs corps sont tragiques! Ça vient du ventre, c’est viscéral!

La pièce a été écrite en français, mais des passages en langue wolastoqiyik y ont été intégrés. On les entend ou ils sont projetés sur un écran.

C’est important d’entendre cette langue-là sur la scène, de la lire, même si on ne la comprend pas. On dirait que je ne suis plus capable de m’empêcher de la mettre dans mes textes. Ça fait partie de l’ADN de l’histoire.

Et ça contribue du même coup à ce que les langues autochtones se transmettent, survivent, et qu’on en laisse des traces. Donc, c’est aussi un travail social, politique, historique. C’est plus qu’un choix artistique.

Effectivement, c’est un choix d’éducation… Oui, on peut considérer ça comme un geste politique, de s’affirmer, d’être fier de ces langues-là! On l’aborde d’ailleurs dans la pièce! Le personnage de Martin revient dans son ancien village avec ce désir de léguer une langue qu’il a réussi à apprendre petit à petit, quand il était dans le bois avec un aîné. Il dit : « C’est la chose la plus riche qu’on a! C’est comme ça qu’on va pouvoir faire survivre la communauté. » Ce n’est pas en faisant un port méthanier ou quoi que ce soit de politique ou d’économique! La survie d’une nation, c’est la langue.

Nmihtaqs Sqotewamqol / La Cendre de ses os a d’abord été présentée en lecture publique au Festival du Jamais Lu en 2019. Comment l’œuvre a-t-elle évolué depuis?

J’ai commencé à l’écrire en 2018. C’est parti un peu du premier spectacle que j’ai fait sur les sujets de la transmission, de l’identité, qui s’appelait Ktahkomiq. Je trouvais que je n’avais pas fait le tour en lien avec l’identité et la communauté dont je fais partie. Chez Ondinnok, on travaille beaucoup sous forme de laboratoire. Alors, j’ai amené mes acteurs dans le Bas-du-Fleuve. On y a bossé pendant une semaine, dans une maison, dans laquelle on habitait également. Il y avait donc constamment une discussion à propos du travail. C’est comme ça que le texte s’est construit. Ce qui est important, et je le dis tout le temps, c’est le résultat, d’arriver au bout et que tout le monde soit fier de ce qu’il a fait.

Si vous n’aviez pas de contraintes de budget, de temps, votre plus grand fantasme artistique, quel serait-il?

On est plein d’amis ensemble, qui sont tous passés chez Ondinnok. Tout le monde est séparé dans diverses compagnies et je trouve qu’on s’oublie beaucoup. J’aimerais faire une espèce de voyage autochtone d’est en ouest, partir avec un camion, une troupe, un chapiteau, une maison longue, et se promener comme à l’ancienne et faire ce théâtre organique, sans artifice, dans les communautés autochtones, dans les villes. Au bout de l’itinéraire, on pourrait transmettre autre chose, avec les autochtones de l’ouest du pays. Ce serait comme un chemin de passation, mais théâtral. C’est vraiment embryonnaire comme projet, mais c’est quelque chose qui me fait rêver.

Quels ont été vos derniers coups de cœur artistiques autochtones?

J’ai écouté le dernier disque de Samian. Pour moi, c’est un travail colossal de faire un disque dans la langue anichinabée, quand tu ne la parles pas vraiment. C’est faire un effort grandiose. Également, toutes les œuvres de Caroline Monnet, j’aime beaucoup. La pièce Okinum de sa sœur Émilie, qui est en lice pour les Prix littéraires du Gouverneur général 2021. Mais je pense que la dernière chose que j’ai aimée et qui m’a fait réfléchir, c’est le rapport autochtones et non-autochtones, quand je suis allé voir l’exposition sur Riopelle au Musée des beaux-arts de Montréal. Ça m’a beaucoup touché! Ce que j’ai envie de dire aux gens, c’est : allez dans les musées, c’est la meilleure chose à faire! Il y a beaucoup de livres aussi! Soyez curieux!

La pièce Nmihtaqs Sqotewamqol / La Cendre de ses os, écrite et mise en scène par Dave Jenniss, est présentée au Théâtre La Licorne de Montréal jusqu’au 12 novembre 2021. Toutes les infos ici.

Pour suivre les créations d’Ondinnok, c’est ici.

CRITIQUE DE LA PIÈCE FAIRE LA LEÇON, DE RÉBECCA DÉRASPE, MISE EN SCÈNE PAR ANNIE RANGER

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Illustration : Diana Aziz.

Texte : Julie Baronian

Un gymnase converti en salle des profs, une photocopieuse, quelques bancs… et quatre enseignants – Camille, Mireille, Étienne et Simon – dans une école où aucun élève n’a levé la main depuis trois ans.

De la rentrée des classes jusqu’au party des Fêtes, les protagonistes, dont les rôles sont tenus par Solo Fugère, Xavier Malo, Marilyn Perreault et Klervi Thienpont, se rencontrent dans cette salle, comme dans un espace de décompression, seul lieu où ils peuvent dévoiler leur vulnérabilité et s’exprimer sans filtre.

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Photo : Eugene Holtz.

La distribution nous offre une très bonne performance, malgré un jeu parfois inégal. L’interprétation très appuyée accentue le côté absurde de la pièce. Mais ce qui attire l’attention dès le début, ce sont les mouvements saccadés, chorégraphiés des personnages, l’exécution très physique. Le propos du spectacle est porté autant par le texte, très rythmé, que par la gestuelle singulière des enseignants. On reconnaît là la signature de la metteuse en scène Annie Ranger, cofondatrice du Théâtre I.N.K, une compagnie qui explore avant tout les mouvements dans le jeu théâtral. Cette particularité ajoute assurément une dimension importante à Faire la leçon, tantôt dramatique, tantôt comique.

Le système d’éducation actuel est remis en question avec beaucoup d’humour et de poésie dans cette œuvre de Rébecca Déraspe, en abordant les angoisses, les difficultés et les drames que vivent les professeurs, de leur propre vision des choses. Racisme, homosexualité, devoir de réserve, dépression, anxiété sont autant de sujets explorés qui nourrissent la réflexion du spectateur. Des situations absurdes auxquelles les enseignants sont souvent confrontés de nos jours sont aussi illustrées : travaux de construction pendant les cours, manque de locaux, absence de climatisation, et autres.

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Photo : Eugene Holtz.

Dans l’ensemble de son œuvre, la dramaturge québécoise examine les multiples facettes des inégalités sociales et de la détresse humaine. Faire la leçon ne fait pas exception. Rébecca Déraspe est également très attachée au monde des enfants, pour lesquels elle a signé plusieurs pièces, notamment Je suis William, qui a remporté le prix de la critique « meilleur spectacle jeune public » en 2018.

Bien que Faire la leçon nous fasse souvent sourire par l’absurdité et le sarcasme qu’il nous présente, il pose quand même un questionnement actuel et nécessaire sur le système d’éducation. Les adolescents et les jeunes enseignants se sentiront sûrement les plus touchés et concernés par le propos.

 

Fait intéressant, à l’invitation de la metteuse en scène Annie Ranger, des personnalités de divers milieux – parmi lesquels, des employés de commission scolaire, des professeurs, des activistes – prennent la parole sur le thème des enjeux de l’éducation pour une durée de trois minutes avant chacune des représentations.

La pièce Faire la leçon de Rébecca Déraspe, une production du Théâtre I.N.K., mise en scène par Annie Ranger, est présentée du 12 au 29 novembre 2019, au Théâtre Aux Écuries.

Pour toutes les informations : auxecuries.com/projet/faire-la-lecon

 

 

 

 

 

 

 

Texte : Karine Tessier

Photo : Amber Dawn Bellemare.

Des miroirs. Une série de photographies dissimulées sous un foulard. Une tringle à laquelle sont suspendus des sous-vêtements de dentelle. Des rideaux de mousseline immaculés. Mais, surtout, des centaines d’égoportraits disposés sur un immense mur blanc. Bienvenue dans le boudoir de Amber Dawn Bellemare, lieu de présentation de son exposition/performance The Parlour Project : Spider, Fly, and Web, à laquelle se grefferont un livre et un documentaire.

L’œuvre immersive de la Montréalaise, à la fois provocante et sensible, illustre la réalité vécue par l’artiste en tant qu’ex-travailleuse du sexe, utilisant les contributions de ses clients pour financer ses créations. Amber Dawn Bellemare y explore les multiples facettes de la femme, réfléchit sur la marchandisation de son corps, le pouvoir, les normes sociales ou les médias sociaux. Encore davantage, elle souhaite raconter le plus vieux métier du monde en allant au-delà de la superficialité, des préjugés, de la honte. Rencontre avec une artiste pour qui rien n’est tout noir ou tout blanc.

Comment vous est venue l’idée de départ de cette exposition/performance?

Je ne pourrais pas dire qu’elle est venue d’une seule chose. Comme je réalise des documentaires, c’est cette partie du projet qui m’a d’abord intéressée. Les égoportraits, pris avant et après chacun de mes rendez-vous avec mes clients, et parfois pendant, n’étaient que pour moi. Lorsque je les montrais à mes amis proches, chacun avait quelque chose de différent à dire. C’était le point de départ de multiples conversations.

Ça m’a fait réaliser à quel point ces photographies – il y en a plus de 1 800 – étaient pleines de sens, mettaient au défi les gens. C’est une opportunité d’aller au-delà de l’image, de vraiment voir la personne qui se cache derrière. On y voit la beauté de la vérité, et c’est ce que je voulais exprimer avec ces portraits de moi.

Photo : Amber Dawn Bellemare.

Quelle réaction vous souhaitez susciter auprès du public qui visitera votre studio?

Je souhaite qu’ils voient quelque chose en eux qui les aidera à adoucir leur cœur, à s’élever. Toutefois, si les gens ne voient dans mon œuvre qu’un objet sexy qui les allume, je ne les jugerai pas. Ce sera suffisant. Ça suscitera d’autres types de conversations.

J’espère créer un moment d’intimité avec le public, connecter avec lui. Il y a plusieurs niveaux à cette interaction. Les gens qui viendront visiter mon boudoir, ils s’offriront, en quelque chose, et j’en suis pleine de gratitude. Ensuite, il y a la connexion, l’espace où nous pourrons nous rejoindre.

Comment s’est passée votre collaboration avec Sharon Bass, artiste, aînée et mentor Anishinaabe, White Thunderbird Woman?

Lorsque nous nous sommes rencontrées à Vancouver, nous avons immédiatement connecté. Elle dirigeait un cercle de guérison. Et elle m’a prise sous son aile. Elle m’a enseigné qu’on doit cultiver qui nous sommes vraiment. L’identité, c’est l’histoire de notre vie.

Sharon m’a guidée dans le processus créatif, qui permet l’exploration de notre identité et la guérison de l’âme. J’ai voulu créer un espace sécuritaire, avec des rituels spécifiques, pour réfléchir et partager. Parce qu’il est nécessaire d’apaiser les deux parties pour arriver à un dialogue ouvert et sincère, puis à une réconciliation.

Comment The Parlour Project vous a-t-il changée?

Je ne me sens plus vulnérable, désormais. Il m’a permis de me libérer à l’aide de la vérité. Ç’a été une guérison pour moi. Et j’ai aussi pu assister à la guérison d’autres personnes, dans le processus. Me présenter en tant qu’artiste, plutôt que comme travailleuse du sexe, ça ouvre des canaux de communication, notamment avec ma famille. Les gens ont accepté ma démarche. Et c’est très apaisant, thérapeutique, de se défaire de la honte ou du jugement.

Vous dépeignez le travail du sexe d’une manière inédite, qui va au-delà du traumatisme, qui a même certains aspects positifs.

Beaucoup de travailleuses du sexe se décriraient comme thérapeutes. Le sexe est souvent utilisé comme un remède. Bien sûr, je ne parle pas pour toutes. Mais, d’une certaine manière, comme c’est le cas avec le reiki, la massothérapie, la psychologie, nous connectons avec les gens qui nous paient.

Le traumatisme peut être incroyable! Il s’agit d’une opportunité de grandir, de développer une plus grande compassion pour l’être humain. Je choisis de voir le beau dans l’être humain.

 

L’exposition/performance The Parlour Project : Spider, Fly, and Web de Amber Dawn Bellemare est présentée du 19 au 28 septembre au studio du Wolf Lab, un collectif montréalais de femmes artistes.

Pour toutes les informations : www.theparlourproject.com

CRITIQUE DU SPECTACLE NOUS SERONS ÉTERNELS, MIS EN SCÈNE PAR PATRICK R. LACHARITÉ.

Texte : Karine Tessier

Photo : Maxim Paré Fortin.

Le maître de cérémonie (Yann Villeneuve), vêtu telle une souveraine élisabéthaine, déclame des vers shakespeariens d’une voix singulière, travaillée. Sa performance est brève, mais sa présence captive. L’artiste est charismatique, un peu à la manière des icônes du glam rock.

Derrière un rideau diaphane, le MC prend place sur le trône au fond de la scène, occupée par une douzaine d’acteurs. Ceux-ci, habillés de fringues aux couleurs saturées, dansent chacun pour soi sur des rythmes électroniques hypnotiques, signés Y pop coit. Ce défouloir épuisant les fait se rapprocher de plus en plus, jusqu’à ce qu’ils ne fassent plus qu’un groupe qui saute à l’unisson, sur un beat qui rappelle les pulsations cardiaques.

Tâchant de reprendre leur souffle, ils s’assoient en bord de scène. Sauf une actrice, qui, lentement, sensuellement, se dénude et s’enduit de boue. Transformée ainsi en déesse de la mythologie antique, elle se dirige de l’autre côté de la scène, garni de faux gazon et de quantité de fleurs de plastique multicolores. C’est vers ce jardin d’Éden synthétique que la rejoindront les autres, en se mouvant au ralenti sur le sol.

Ainsi s’ouvre Nous serons éternels, d’après les sonnets de Shakespeare, la dernière création du metteur en scène Patrick R. Lacharité et de La Fratrie. Pendant un peu plus d’une heure, les rimes de l’écrivain anglais seront revisitées en français, en anglais, en mouvement, en chanson.

Cette relecture de ces poèmes écrits au 17e siècle, en collaboration avec le dramaturge William Durbau, est aussi brillante qu’astucieuse. On y met de l’avant des thèmes chers à Shakespeare, comme l’amour, la luxure, la trahison, la cruauté du monde, en soulignant leur intemporalité. Mais on se défait en même temps des codes élisabéthains. Ici, la passion amoureuse et charnelle est épanouie, et non sujette au châtiment. Quant à la vengeance, bien qu’encore douloureuse, elle verse généreusement dans l’absurde.

Dans cet emballant exercice de style, certaines scènes se démarquent. À chacune des présences de Sébastien Tessier, en animateur de discussion féru de l’œuvre shakespearienne, les éclats de rire retentissent. Le public craque totalement pour l’humour décalé du comédien et les malaises délicieux créés par son personnage.

Photo : Maxim Paré Fortin.

Dans un tout autre registre, le numéro de danse de Natacha Filiatrault est à couper le souffle. Son énergie brute prend toute la place, alors qu’elle exécute une sorte de danse de la séduction, passant de mouvements bruts inspirés du krumping à des gestes très sexuels. Au sol, elle termine sa performance en récitant des rimes, le souffle court et le regard intense.

Quant à Alexa-Jeanne Dubé, assise dans l’espace gazonné et fleuri, elle règle ses comptes avec un amoureux qui l’a trahie, se plongeant la tête à répétition dans un seau d’eau métallique. Une illustration si juste de cet état quelque part entre le désespoir et l’autodérision qui nous anime en période de rupture amoureuse.

Photo : Maxim Paré Fortin.

La proposition de Patrick R. Lacharité et de La Fratrie est une réflexion pertinente sur l’intemporalité, qui se déroule dans un univers onirique. On s’y interroge sur notre envie d’éternité. Ne s’agit-il que d’une manifestation de notre ego surdimensionné, d’un besoin croissant d’être vu, en cette ère de selfies et d’autopromotion sur les médias sociaux? Ou désire-t-on plutôt transmettre aux générations futures des valeurs, des œuvres artistiques, un héritage, que l’on croit menacés en ces temps où le monde semble courir à sa perte?

Nous serons éternels n’apporte pas toutes les réponses aux questions qui nous animent. Ce spectacle ludique et débridé sert plutôt à nous faire prendre conscience de l’absurdité de la vie. Pourquoi s’interroger sur l’éternel, alors que la pérennité de notre monde nous semble de moins en moins sûre, à une époque où les conflits armés, les catastrophes naturelles et les manifestations de repli identitaire défraient la manchette au quotidien? Laissons plutôt nos pulsions de vie triompher pendant qu’il en est encore temps. Ce qui importe, c’est le temps qu’il nous reste.

Nous serons éternels, mis en scène par Patrick R. Lacharité, est présenté à La Chapelle, Scènes contemporaines, du 23 au 28 avril.

Toutes les informations : lachapelle.org/fr/nous-serons-eternels-dapres-les-sonnets-de-shakespeare

CRITIQUE DU SPECTACLE UN TEMPS POUR TOUT, de Sovann Rochon-Prom Tep.

Texte : Karine Tessier

Photo : David Wong.

Un large carré blanc dessiné au sol. Dispersés tout autour, des coussins, des plantes et quelques meubles dépareillés. De la fumée odorante s’échappe d’un encensoir. Alors que les spectateurs prennent place sur les coussins à même le sol ou dans les gradins, on distribue des tasses de thé brûlant.

Jean-Édouard Pierre Toussaint alias Sangwn s’avance seul sur le carré blanc. Il esquisse d’abord ses mouvements avec retenue. Puis, les muscles et l’esprit s’échauffent, et la chorégraphie s’intensifie. Le corps du danseur est traversé par toute une gamme d’émotions, se traduisant parfois par de puissants soubresauts. Sa respiration fait office d’instrument, rompant le silence qui règne dans la salle. Des sons s’échappent de sa bouche. Un mot, répété encore et encore : love. Tantôt avec tendresse, tantôt avec fureur. « Bonjour, tout le monde! Je sais pas quoi dire, comme. » Mais Sangwn a déjà tellement dit.

Ce numéro d’ouverture d’Un Temps pour tout, dernière œuvre de Sovann Rochon-Prom Tep, a su rapidement capter l’attention du public. Il est en quelque sorte une invitation à suivre les trois danseurs dans leurs expérimentations vocales et physiques pendant la prochaine heure et demie. Et, à cet appel, les spectateurs répondent spontanément oui.

À Sangwn, se joignent Fréderique Dumas alias PAX et Ja James Britton Johnson alias Jigsaw. Les trois se connaissent depuis une dizaine d’années et tirent leur épingle du jeu dans la communauté hip-hop montréalaise et internationale. En solo, en duo ou tous ensemble, ils enchaînent les mouvements naturellement, avec complicité, et se lancent des encouragements.

Le spectacle, le plus souvent, prend des airs de grosse fête improvisée. Mais, à d’autres moments, le temps semble suspendre son vol. Lorsque Jigsaw, après des salutations fébriles, raconte par sons et par gestes l’histoire d’arbres, le public est tantôt amusé, tantôt provoqué, mais surtout captivé. Le danseur se démarque à nouveau dans la deuxième partie du spectacle, alors qu’il chante des mélodies aux accents blues couché sur le sol, les yeux fermés.

Contrairement à bien des performances de danse hip-hop, Un Temps pour tout est interprété sur de la musique jouée en direct. Les talentueux Vithou Thurber-Prom Tep, au clavier, et Thomas Sauvé-Lafrance, à la batterie, performent en totale symbiose avec les trois interprètes. Leurs rythmes, alliant hip-hop organique et synthétiseurs très 80’s, sont hyper accrocheurs.

Habitués des battles et des jams, les trois danseurs ont dû, cette fois, sortir de leur zone de confort. Travailler avec ou sans musique, chanter, offrir des performances plus longues qu’à leur habitude. Ils relèvent ce défi avec brio, bien ancrés dans le moment présent, le cœur grand ouvert.

Sovann Rochon-Prom Tep. Photo : Christian Moreau.

Pour mettre au monde sa dernière création, le polyvalent Sovann Rochon-Prom Tep a travaillé en étroite collaboration avec les artistes, considérant leur vécu comme une matière première. Ils ont fonctionné par essais et erreurs pour mettre en scène leurs expériences, bien plus que des mouvements. L’humain est au centre de l’œuvre. Et le ressenti a préséance sur l’esthétisme.

Les spectateurs qui étaient dans la salle le soir de la première pourront témoigner de la sensibilité du danseur et chorégraphe… qui a profité de l’entracte pour faire tirer des gâteaux, marinades et savons fabriqués par lui et son père. Une scène plus que rare dans les théâtres et qui a touché droit au cœur les gens présents.

Photo : David Wong.

Un Temps pour tout est une réflexion à la fois intime et collective sur l’identité et la communication humaine. Bien que le public ne participe pas concrètement au spectacle, il est interpellé de multiples façons. On tente d’attirer son attention, de l’impressionner, de le provoquer, de tisser des liens avec lui. Il assiste aux multiples métamorphoses de Sangwn, PAX et Jigsaw, qui se présentent à lui avec sincérité.

Il s’agit d’un spectacle qui intéressera autant les amateurs de hip-hop que ceux qui n’y connaissent rien. Mais, surtout, c’est un baume au cœur en ces temps où on semble parfois manquer cruellement d’humanité.

Un Temps pour tout, de Sovann Rochon-Prom Tep, a été présenté du 31 janvier au 4 février. Il sera repris en supplémentaires les 13, 14 et 17 mai prochains, toujours à La Chapelle Scènes contemporaines.

Toutes les informations ici : lachapelle.org/fr/programmation/un-temps-pour-tout

 

 

Texte : Karine Tessier

Photo : Andrée Lanthier.

Alors que la noirceur tombe dans la salle du Centaur Theatre, les premières notes de Power de Kanye West résonnent. Une pièce dont les paroles, de la bouche même du rappeur américain, représentent un hymne au super-héros, tout en abordant les thèmes de la critique, du désespoir et du suicide. Une œuvre qui illustre à la fois la force de la communauté noire américaine et les combats qu’elle mène toujours contre les inégalités sociales.

Au son de cette puissante mélodie, s’installent sur scène Pharus et ses copains de la chorale de la Charles R. Drew Prep School, Bobby, A.J., David et Junior. À la fin de l’année scolaire, le groupe est chargé d’interpréter l’hymne de l’école, Pharus en tête. Lorsqu’un de ses camarades lui murmure des quolibets homophobes, le jeune homme cesse de chanter, ce qui irrite le directeur Marrow. Quand celui-ci demande des comptes à Pharus, l’élève refuse de dénoncer son collègue, affirmant que ça ne respecterait pas le code d’honneur de l’institution d’enseignement. Mais, l’automne venu, alors que Pharus est en dernière année et à la tête de la chorale, il a bien l’intention de se venger.

Photo : Andrée Lanthier.

Choir Boy, de Tarell Alvin McCraney et mise en scène par Mike Payette, ouvre la saison du Centaur Theatre, qui fête cette année son 50e anniversaire. Un choix qui reflète l’audace de cette institution montréalaise, qui a toujours fait la part belle à la diversité dans sa programmation. Le drame musical a été joué pour la première fois en 2012, au Royal Court Theatre de Londres. Et, en décembre prochain, il sera monté à Broadway, au Manhattan Theatre Club. Dire que cette première new-yorkaise est attendue relève de l’euphémisme, alors que se multiplient les critiques élogieuses dans les médias nord-américains et européens.

Auteur de plusieurs pièces, le dramaturge McCraney s’est fait connaître par plusieurs en remportant, avec le réalisateur Barry Jenkins, l’Oscar du meilleur scénario – adaptation pour le film Moonlight, lors de la cérémonie des Academy Awards de 2017. Un coming-of-age bouleversant, qui aborde les thèmes des identités afro-américaine, masculine et sexuelle. Des sujets rarement abordés dans une même création, que ce soit sur les planches ou au grand écran.

Dans Choir Boy, les mêmes thématiques complexes. On y suit le cheminement d’un groupe d’adolescents noirs, pensionnaires d’une école privée. Entre les murs de l’institution, véritable microcosme de la société américaine, ils seront déchirés entre amitiés et rivalités. Bien difficile, en effet, de faire abstraction de l’intolérance ou de la jalousie d’autrui, quand la construction de notre propre identité passe par le regard de l’autre. Ces garçons dans la fleur de l’âge prendront conscience que, si un monde de possibilités s’ouvre à eux, les obstacles qui jalonneront la route qui les sépare de leurs rêves sont légion.

Dans le rôle principal, le charismatique Steven Charles campe un Pharus aussi flamboyant qu’attachant, dont la résilience est inspirante. À ses côtés, Lyndz Dantiste émeut par la compassion et l’ouverture qu’il insuffle au personnage de A.J., joueur dans l’équipe de baseball du lycée et cochambreur de Pharus. La complicité entre les deux acteurs offre au public certaines des plus belles scènes du spectacle, dont l’inoubliable moment où A.J. coupe les cheveux de son ami, qui refuse de se rendre chez le barbier, où on se moquait de lui alors qu’il était enfant.

Photo : Andrée Lanthier.

À leurs côtés, Patrick Abellard offre une performance toute en nuances. Son Bobby, qui n’hésite pas à faire appel à l’intimidation pour faire sa place, dévoile peu à peu sa vulnérabilité. Christopher Parker est quant à lui solide dans son interprétation de David, un jeune homme chrétien troublé. Si le personnage de Junior se fait plus discret dans l’histoire de Choir Boy, Vlad Alexis vole la vedette à chacune de ses apparitions, grâce à un talent de comique hors du commun.

Les cinq jeunes bourrés de talent sont épaulés par deux artistes d’expérience, qu’on a déjà vus sur les planches du Centaur Theatre : Quincy Armorer, aussi directeur artistique du Black Theatre Workshop, dans le rôle de l’autoritaire directeur Marrow, et Paul Rainville, dont le Mr. Pendleton tentera d’enseigner aux élèves à développer leur créativité. Tous deux livrent leurs lignes avec un sens du rythme sans faille.

Photo : Andrée Lanthier.

La distribution impressionne tout autant dans les numéros musicaux, exécutés avec énergie et passion. Si les opinions et les caractères des cinq jeunes les divisent, leurs voix s’unissent à la perfection. Les pièces gospel témoignent de l’histoire complexe des États-Unis et des luttes de la communauté afro-américaine, qui subit, encore aujourd’hui, les contrecoups de l’esclavage. Leur interprétation a cappella met en valeur les histoires tragiques qu’elles racontent.

Une scène inoubliable : la chanson Motherless Child, livrée sous la douche par les élèves. Baignés d’une lumière éthérée, les adolescents chantent cette pièce traditionnelle décrivant la séparation des esclaves d’avec le continent africain, leur culture, leur famille. Ici, Motherless Child fait également écho à la solitude des garçons, séparés de leurs parents et se sentant incompris par le monde qui les entoure. Chapeau au directeur musical de Choir Boy, Floydd Ricketts, aussi chef du McGill University Chorus, qui a su rendre les mélodies pertinentes et modernes, tout en respectant leur importance historique.

On s’en voudrait de ne pas mentionner le travail inspiré de Rachel Forbes, dont la scénographie, astucieuse, permet de maximiser l’espace, tout en situant l’action dans une demi-douzaine de lieux. Les décors, magnifiques, sont mis en valeur par les éclairages élégants conçus par Andrea Lundy.

Photo : Andrée Lanthier.

Choir Boy se veut une réflexion nuancée sur l’identité et le respect des traditions, qui provoque le spectateur en le confrontant à ses propres préjugés. Comment concilier héritage culturel et émancipation? Une question encore plus difficile à se poser lorsqu’elle s’ajoute aux interrogations inhérentes à l’adolescence, aux rêves et aux peurs caractéristiques de l’âge tendre. Une pièce au cœur grand comme le monde, dont l’intelligence n’a d’égal que sa grande beauté.

Choir Boy, de Tarell Alvin McCraney, mise en scène par Mike Payette, est présentée du 9 au 28 octobre 2018, au Centaur Theatre, à Montréal.

Toutes les informations ici : www.centaurtheatre.com/choir-boy.html

Texte : Karine Tessier

Visuels créés par les artistes Pénélope et Chloë.

Du 25 mai au 3 juin, à Montréal, les murs s’abattent. Entre les différentes disciplines artistiques. Entre ceux qui foulent les planches et le public. Mais aussi dans les profondeurs insondables de notre imaginaire. À OFFTA, festival d’arts vivants, on laisse à une cinquantaine d’artistes du théâtre, de la danse et de la performance tout l’espace nécessaire pour créer. Pour cette 12e édition, ils s’interrogent sur les frontières, un thème aussi rassembleur que polarisant. Morceaux choisis d’une programmation débridée, qui fait la part belle à l’hybridité.

Danse Mutante, c’est le relai chorégraphique imaginé par l’incontournable Mélanie Demers et sa compagnie MAYDAY. Prenant racine dans la métropole, la création poursuivra sa route à New York, Bamako, Anvers/Rotterdam, avant de se poser à nouveau à Montréal, à l’automne 2019, à l’occasion d’un événement-marathon. On savourera chaque mouvement esquissé par Francis Ducharme et Riley Sims, sur des mélodies de Mykalle Bielinski.

Si vous êtes charmé par les rimes et les notes envoûtantes de cette dernière, sachez qu’elle proposera, à OFFTA, son concert immersif Mythe, où s’entrelacent chant polyphonique, poésie orale et improvisation. La communion de six femmes, qui chanteront leur rapport au temps, à l’autre, à elles-mêmes.

À mille lieues de l’univers éthéré de Mykalle Bielinski, MAC(DEATH), de Jocelyn Pelletier. Sur scène, l’œuvre de Shakespeare prend des airs de concert métal. L’artiste fait un doigt d’honneur aux codes traditionnels, désireux de faire résonner les classiques ici et maintenant.

Il y a 70 ans, ce sont les signataires du manifeste Refus global qui se questionnaient sur les contraintes sociales. Leur percutant texte trouve-t-il encore écho auprès des Québécois, des décennies après sa parution? L’exposition Refus Contraire, à laquelle une vingtaine d’artistes et d’intellectuels ont contribué, se penche sur la question. À voir à la Galerie de l’UQAM, du 16 mai au 16 juin.

Vous vous passionnez pour l’envers du décor? Tendez l’oreille à la quotidienne OFF.Radio, qui proposera, tout au long du festival, des panels et des performances en lien avec sa programmation. Les émissions, enregistrées au Monument-National, seront disponibles sur les différentes plateformes de l’événement. Parmi les thèmes abordés : la notion de frontière dans le processus de création, la mémoire collective, les arts du cirque.

Pour son œuvre performative et expérimentale Nous serons universel.le.s, Kamissa Ma Koïta s’est nourrie autant des approches féministes, des mouvements altermondialistes et queer, que de la culture populaire. Une expérience immersive, où vous vous interrogerez sur les notions de privilèges sociaux.

L’une des six résidences de création présentées lors de cette 12e édition d’OFFTA, le projet Après la rue, de Mireille Camier et Ricard Soller i Mallol, juxtapose les récits de quatre artistes qui ont vécu de l’intérieur un mouvement de contestation populaire d’importance : la révolution verte à Téhéran en 2009, la révolution du jasmin à Tunis en 2011, les indignés à Barcelone en 2011, ainsi que le printemps érable à Montréal en 2012.

Aalaapi ᐋᓛᐱ, c’est un laboratoire conçu à partir d’un documentaire radiophonique, fruit d’une collaboration entre Québécois et Innus, qui donne la parole à des jeunes de 20 à 32 ans, qui se confient sur leurs passions, leurs peurs, leurs doutes.

Finalement, un rendez-vous incontournable de ce festival d’arts vivants, le MixOFF – Frontières & Boundaries, le résultat de plusieurs semaines de rencontres entre artistes et chercheurs, qui ont réfléchi ensemble sur le thème des frontières.

Pour tout savoir sur la programmation : offta.com