Archives de la catégorie ‘Arts visuels’

Texte et photos : Karine Tessier

Photo : David Wong.

Rares sont les projets qui fusionnent les domaines de l’art et de la santé. Présenté à Tangente, dans l’Édifice Wilder, l’événement multidisciplinaire Les Jeux du crépuscule, dont la création et la direction artistique sont signées Ariane Boulet, se veut une réflexion aussi intime que grandiose sur notre rapport au vieillissement et à la maladie. En plaçant la danse au service de l’humain, l’artiste nous invite à explorer ces passages obligés de l’existence, pour les adoucir et, peut-être, les réinventer.

Une œuvre chorégraphique d’abord, mais également une exposition, des ateliers de coprésence, des discussions, un recueil de poèmes. Un bouquet d’activités, que le public peut découvrir en tout ou en partie et pendant lesquelles il est parfois invité à participer.

Photo : David Wong.

Le spectacle est le résultat de huit années de visites dans plus d’une vingtaine de CHSLD, avec le projet Mouvement de passage. Ariane Boulet et ses acolytes y ont côtoyé des dizaines de personnes âgées en perte d’autonomie ou en fin de vie, insufflant dans leur quotidien souvent difficile un brin de magie. Ils ont égayé les chambres, les espaces communs et même les couloirs des établissements de soin et ont permis aux aînés de s’exprimer, d’interagir, de stimuler leur créativité, de se raconter à travers les gestes et la musique, sans même prononcer un mot. Les résidents ont tissé des relations avec l’autre, un défi immense, dont la réalisation est facilitée par l’intervention de l’art.

Ce sont toutes ces expériences, à la fois banales et hors du commun, douloureuses et légères, tragiques et hilarantes, qui nous sont racontées par les talentueux interprètes des Jeux du crépuscule. Des souvenirs physiques, sensoriels et émotifs, témoins de transformations personnelles résultant du vieillissement et de la maladie. Une dame qui offre à une danseuse une visite guidée de sa chambre, comme si la pièce exiguë tenait davantage d’un majestueux château. Une résidente à l’âme séductrice qui caresse sensuellement le bras d’un artiste, l’œil coquin. Un vieillard malentendant qui « écoute » la mélodie en ressentant les vibrations qui émanent du sol. Une femme atteinte de démence qui, chaque jour, « attend l’autobus » devant la porte de l’ascenseur.

Il émane de l’œuvre d’Ariane Boulet une bienveillance et une tendresse touchantes, un profond respect pour les aînés rencontrés et leurs vies si riches. Sans taire la souffrance,  la créatrice et ses complices proposent au public de focaliser sur l’apport des personnes âgées à notre société, leur générosité, leur humour, leurs 1 000 histoires. Le groupe nous assure qu’il y a, dans les CHSLD, lieux où les conditions de vie et de travail sont parfois pénibles, un « potentiel de party à chaque coin de couloir ».

Photo : David Wong.

Cette sensibilité à fleur de peau, couplée à des habiletés techniques certaines, fait d’Audrey Bergeron, Lucy M. May, Isabelle Poirier, David Rancourt, Georges-Nicolas Tremblay et Julie Tymchuk de grands interprètes. Charismatiques, ils nous offrent un récit qu’on savoure doucement et qui nous fait tantôt rire à gorge déployée, tantôt s’essuyer une larme furtive sur la joue. Si la chorégraphie nous émeut autant, c’est aussi parce qu’elle nous confronte à notre propre fragilité, au caractère inéluctable de la maladie et de la mort.

Photo : David Wong.

Pour accompagner les mouvements fascinants des danseurs, la voix et les mélodies sublimes de Marie Vallée, qui signe la direction musicale, la composition et l’interprétation de la bande sonore des Jeux du crépuscule. La performance de l’artiste sur et aux abords de la scène, plutôt que l’utilisation de pistes préenregistrées, ajoute à l’ensemble une intensité captivante.

On quitte la salle chaviré, avec en main un petit poème d’Ouanessa Younsi, autrice et psychiatre, ainsi qu’une semence de fleur de calendule, symbole du cycle de la vie. De petites attentions qui permettront à l’œuvre d’Ariane Boulet de nous accompagner encore plus longtemps dans le temps.

Bande-annonce ici.

Pour toutes les infos, c’est ici.

Atelier : Rencontre avec la technologie de la présence.

Juste avant la représentation, on a eu le privilège d’assister à une des activités inspirées par les recherches des scientifiques Stefanie Blain-Moraes et Naila Kuhlmann. Un petit capteur attaché à notre doigt, pour enregistrer les données de notre système nerveux, on s’est laissé guider par les directives de l’animateur Marco Pronovost. Après quelques profondes respirations, on a été invité à explorer et développer une connexion avec un autre participant à l’atelier, en improvisant des mouvements. Puis, les chercheuses ont analysé les chiffres recueillis, en plus de nous en dire davantage sur leurs travaux. Passionnantes, leurs études ont notamment permis d’observer chez des patients atteints de démence des réactions physiques à l’autre, comme si le corps conservait des souvenirs de rencontres passées que l’esprit a oubliées.

Pour en apprendre plus, c’est ici.

Exposition de Marie-Hélène Bellavance

Lors de ses ateliers créatifs donnés en CHSLD, l’artiste visuelle propose aux résidents et à leurs proches aidants de fabriquer de petites maisons à souvenirs, remplies de fragments de leur histoire personnelle. Avec ce projet intitulé La Maison que j’habite, moi, elle aide les aînés, souvent isolés, déracinés, encore davantage pendant la pandémie de COVID-19, à prendre conscience que leur maison est avant tout à l’intérieur d’eux-mêmes et qu’il est toujours possible de s’y réfugier. Dans l’exposition présentée en accompagnement aux Jeux du crépuscule d’Ariane Boulet, Marie-Hélène Bellavance propose au public les créations des personnes âgées avec qui elle a travaillé, mais aussi ses propres peintures et installations, délicates et précieuses, qui reprennent les thèmes qui l’inspirent depuis ses débuts, soit la vie, la mort, la transformation et la résilience.

L’événement artistique Les Jeux du crépuscule d’Ariane Boulet a été présenté du 28 avril au 1er mai 2022 à Tangente, à l’Édifice Wilder, à Montréal.

Texte : Karine Tessier

Après avoir été projeté en première mondiale au dernier Festival international du film sur l’art à Montréal, le documentaire Libre d’Hélène Bélanger-Martin sort en salles au Québec. Dans ce neuvième film, la cinéaste suit pendant un an le sculpteur et peintre André Desjardins dans la réalisation d’une œuvre colossale. Un moyen métrage intimiste, qui révèle toute la beauté de la création et des liens humains tissés grâce à elle.

Libre, c’est également le nom d’un personnage sculpté par André Desjardins, un être, comme l’explique son créateur, ancré dans le moment présent. Un an après la naissance de cet homme de bronze aux traits sereins, l’artiste décide d’en faire une version monumentale, de deux fois la taille d’une personne, un format qui révèlera encore davantage la puissance tranquille de l’œuvre. Il se donne un an pour accomplir sa besogne.

C’est cette aventure artistique, mais aussi humaine qui est illustrée par le film d’Hélène Bélanger-Martin. Un processus qui n’est pas dépourvu de rationalité, découpé en de multiples étapes, toutes cruciales et nécessitant une patience sans faille. De la numérisation des croquis à l’installation sur les berges du lac Memphrémagog, en passant par l’impression en 3D d’une armature et la correction d’erreurs de proportions, chaque instant fascine.

Les scènes dans lesquelles André Desjardins réfléchit, scrute, façonne, polit, retouche son personnage sont magnifiques dans leur simplicité. Dépouillées de tout artifice, ces séquences sont entrecoupées de plans de la nature québécoise dans ce qu’elle a de plus beau à offrir. Quelques mélodies minimalistes signées Nicolas Marquis se greffent à l’ensemble et ajoutent à l’état méditatif dans lequel nous plonge Libre.

On ne peut qu’être impressionné par le talent de l’artiste, un sculpteur et peintre autodidacte, passionné depuis l’enfance par la construction, le design et l’art. On est tout autant touché par ses souvenirs de jeunesse, souvent heureux, mais parfois tragiques, et les confidences d’un de ses plus fidèles amis et de collectionneurs dévoués.

Pas étonnant qu’Hélène Bélanger-Martin ait su aussi bien nous présenter l’artiste et l’homme qu’est André Desjardins. D’abord, il est son conjoint depuis de nombreuses années. Ils se connaissent par cœur. Mais la cinéaste est également une passionnée d’art, tellement qu’elle a ouvert la Galerie Roccia, à Magog, il y a maintenant plus de 10 ans. Son amour indéfectible pour la création visuelle se remarque tout autant dans sa filmographie, dans laquelle on retrouve de multiples courts métrages documentaires consacrés aux artistes et à leurs méthodes de travail.

Pour André Desjardins, créer, c’est le bonheur. On ne pourrait être plus d’accord. En assistant à la naissance de son œuvre plus grande que nature dans Libre, on se sent privilégié, ému, avec un désir renouvelé de découvrir le travail de nos artistes québécois.

Libre d’Hélène Bélanger-Martin est présenté du 13 au 19 avril à la Cinémathèque québécoise de Montréal, puis en tournée partout dans la Belle Province. Pour les dates, on consulte le site d’André Desjardins ici.

Pour voir la bande-annonce du documentaire, c’est ici.

Pour visionner gratuitement certains des films d’Hélène Bélanger-Martin, notamment Émotionnisme et Devenir, qui mettent aussi en vedette André Desjardins, c’est ici.

Pour en savoir plus sur la Galerie Roccia, c’est ici.

ENTREVUE AVEC DAVE JENNISS, AUTEUR ET METTEUR EN SCÈNE

Texte : Karine Tessier

Dans sa toute dernière pièce, Nmihtaqs Sqotewamqol / La Cendre de ses os, l’auteur, metteur en scène et comédien Dave Jenniss explore à nouveau des thèmes qui lui sont chers, tels le territoire, l’identité et l’héritage. Cette fois, c’est en racontant l’histoire des deux frères Kaktanish, qui réagissent de manière bien différente au décès de leur père, survenu trois ans plus tôt. On s’est entretenu avec l’artiste, qui est également directeur artistique des Productions Ondinnok, première compagnie de théâtre francophone autochtone au Canada, pour en apprendre davantage sur ses méthodes de travail, les projets qu’il aimerait réaliser, ainsi que de ses coups de cœur artistiques autochtones.

Photo : Myriam Baril Tessier.

Dans vos écrits, le thème de la transmission est omniprésent. L’importance de l’héritage pour vous explique-t-elle la nouvelle direction que prend votre carrière?

Je ne suis pas quelqu’un qui aime être à l’avant de la scène. Je l’ai déjà été à l’époque où j’étais acteur. Depuis trois ou quatre ans, depuis que j’ai pris la direction d’Ondinnok, j’ai le goût de plonger dans la mise en scène, dans la direction d’acteurs, et j’aime vraiment ça. J’ai envie de transmettre ce que j’ai appris aux côtés d’Yves Sioui Durand et Catherine Joncas, depuis que je suis arrivé à la compagnie, en 2004. Présentement, je le fais avec mes acteurs qui ne connaissaient pas la troupe. Ils trouvent ça un peu difficile parce que j’ai une approche un peu plus organique, plus spirituelle aussi!

Il y a toujours un élément cérémonial dans votre façon de travailler. Vous brûlez de la sauge, il y a un petit rituel… Ces gestes ont toujours été présents dans votre processus de création?

C’est ce que j’ai appris chez Ondinnok et, pour moi, ça allait de soi que je devais continuer là-dedans. Même si je fais du théâtre un peu plus contemporain, il y a toujours ce côté mythologique à l’intérieur de moi. C’est ma base. C’est pour ça qu’à chaque fois que je fais un atelier, une mise en scène ou que j’écris un texte, il y a des moments où on plonge dans une espèce de monde renversé, un monde imaginaire où on est du côté plus spirituel. Il y a une lenteur également que j’ai apportée, que je trouvais intéressante.

Cette solennité, cette envie de prendre le temps sont à mille lieues de la société de performance dans laquelle nous vivons. Comment les comédiens ont-ils réagi face à cette approche?

Ç’a été un beau défi! Prendre le temps de prendre le temps… Je l’ai dit souvent, souvent, souvent, depuis le début des répétitions : « Vous allez trop vite. Prenez votre temps, il n’y a rien qui presse. » C’est une espèce de contre-théâtre un peu, ce que j’ai essayé de faire avec Nmihtaqs Sqotewamqol / La Cendre de ses os, c’est essayer justement de pas être dans la performance. C’est quelque chose que j’ai appris chez Ondinnok, être juste là, être vrai et se laisser transporter par les mots! Souvent, on n’est pas obligé de jouer énorme, surtout dans une salle comme La Petite Licorne!

Photo : Myriam Baril Tessier.

Parce que les spectateurs, même ceux assis tout au fond, voient les expressions faciales, chaque petit geste.

Oui, c’est ça! Tout le monde a été quand même assez ouvert. Il y a des gens avec qui j’avais déjà travaillé, comme Charles Bender, chez Ondinnok. Mais, les autres, ça leur faisait du bien, ainsi que l’absence totale de jugement. Ça fait partie des pierres fondatrices de la compagnie : ne jamais se juger, ne jamais juger l’autre. On a la chance d’avoir un aîné anichinabé avec nous, qui joue, Roger Wylde. Il amène un calme, une sérénité, et on le ressent même dans le spectacle.

Vous êtes directeur artistique de la troupe depuis maintenant quatre ans et demi. Comment voyez-vous ce nouveau rôle de patron?

Je suis, je pense, davantage un ami qui est là pour faire avancer la compagnie avec toute l’équipe. On fait des retraites de groupe, quatre par année. À ce moment, on se retire trois ou quatre jours et on fait des exercices, des ateliers, de la méditation. Et on essaie de trouver les meilleures choses pour faire progression, évoluer Ondinnok.

Quels seraient vos souhaits pour l’avenir de la troupe?

Depuis quelque temps, on est dans une phase de théâtre un peu plus parlé, un peu plus contemporain, notamment avec L’Enclos de Wabush, coproduit avec le Nouveau Théâtre Expérimental, et Nmihtaqs Sqotewamqol / La Cendre de ses os à La Licorne. Juste avant de fermer les bureaux pour la période estivale, j’ai eu une rencontre avec la direction générale, avec les mentors, Yves et Catherine, et j’ai beaucoup parlé de mon désir de revenir à l’ancien Ondinnok, donc un théâtre plus organique, peut-être moins verbeux, plus dans le corps, dans le physique, dans les histoires du passé, dans le lien avec le territoire. J’ai le goût de plonger dans quelque chose comme ça pour les prochaines œuvres.

Photo : Myriam Baril Tessier.

Qu’est-ce que le corps, le mouvement, le silence permettent que les mots ne permettent pas?

Quand les silences sont vraiment là, sont vraiment habités, qu’ils sont faits avec sincérité, qu’on ne les plaque pas avec un jeu d’acteur, je trouve qu’ils sont souvent plus puissants que les mots qui sont dits. J’ai coupé du texte justement en répétition. Tout ce qu’on a décidé de faire, avec mon assistante-metteuse en scène Édith Paquet, c’est une espèce de contre-balancement du jeu. Si on se déplace, on se déplace pour la bonne raison.

D’ailleurs, la structure sur laquelle on joue, faite de bois, peut créer un certain handicap. J’avais ce désir d’une scénographie dans laquelle les acteurs se promènent et se sentent un peu pris, à l’étroit, ce qui les oblige à bouger pour les bonnes raisons. Le déséquilibre leur demande d’ancrer leurs pieds comme des racines. Sans que ce soit joué comme une tragédie, leurs corps sont tragiques! Ça vient du ventre, c’est viscéral!

La pièce a été écrite en français, mais des passages en langue wolastoqiyik y ont été intégrés. On les entend ou ils sont projetés sur un écran.

C’est important d’entendre cette langue-là sur la scène, de la lire, même si on ne la comprend pas. On dirait que je ne suis plus capable de m’empêcher de la mettre dans mes textes. Ça fait partie de l’ADN de l’histoire.

Et ça contribue du même coup à ce que les langues autochtones se transmettent, survivent, et qu’on en laisse des traces. Donc, c’est aussi un travail social, politique, historique. C’est plus qu’un choix artistique.

Effectivement, c’est un choix d’éducation… Oui, on peut considérer ça comme un geste politique, de s’affirmer, d’être fier de ces langues-là! On l’aborde d’ailleurs dans la pièce! Le personnage de Martin revient dans son ancien village avec ce désir de léguer une langue qu’il a réussi à apprendre petit à petit, quand il était dans le bois avec un aîné. Il dit : « C’est la chose la plus riche qu’on a! C’est comme ça qu’on va pouvoir faire survivre la communauté. » Ce n’est pas en faisant un port méthanier ou quoi que ce soit de politique ou d’économique! La survie d’une nation, c’est la langue.

Nmihtaqs Sqotewamqol / La Cendre de ses os a d’abord été présentée en lecture publique au Festival du Jamais Lu en 2019. Comment l’œuvre a-t-elle évolué depuis?

J’ai commencé à l’écrire en 2018. C’est parti un peu du premier spectacle que j’ai fait sur les sujets de la transmission, de l’identité, qui s’appelait Ktahkomiq. Je trouvais que je n’avais pas fait le tour en lien avec l’identité et la communauté dont je fais partie. Chez Ondinnok, on travaille beaucoup sous forme de laboratoire. Alors, j’ai amené mes acteurs dans le Bas-du-Fleuve. On y a bossé pendant une semaine, dans une maison, dans laquelle on habitait également. Il y avait donc constamment une discussion à propos du travail. C’est comme ça que le texte s’est construit. Ce qui est important, et je le dis tout le temps, c’est le résultat, d’arriver au bout et que tout le monde soit fier de ce qu’il a fait.

Si vous n’aviez pas de contraintes de budget, de temps, votre plus grand fantasme artistique, quel serait-il?

On est plein d’amis ensemble, qui sont tous passés chez Ondinnok. Tout le monde est séparé dans diverses compagnies et je trouve qu’on s’oublie beaucoup. J’aimerais faire une espèce de voyage autochtone d’est en ouest, partir avec un camion, une troupe, un chapiteau, une maison longue, et se promener comme à l’ancienne et faire ce théâtre organique, sans artifice, dans les communautés autochtones, dans les villes. Au bout de l’itinéraire, on pourrait transmettre autre chose, avec les autochtones de l’ouest du pays. Ce serait comme un chemin de passation, mais théâtral. C’est vraiment embryonnaire comme projet, mais c’est quelque chose qui me fait rêver.

Quels ont été vos derniers coups de cœur artistiques autochtones?

J’ai écouté le dernier disque de Samian. Pour moi, c’est un travail colossal de faire un disque dans la langue anichinabée, quand tu ne la parles pas vraiment. C’est faire un effort grandiose. Également, toutes les œuvres de Caroline Monnet, j’aime beaucoup. La pièce Okinum de sa sœur Émilie, qui est en lice pour les Prix littéraires du Gouverneur général 2021. Mais je pense que la dernière chose que j’ai aimée et qui m’a fait réfléchir, c’est le rapport autochtones et non-autochtones, quand je suis allé voir l’exposition sur Riopelle au Musée des beaux-arts de Montréal. Ça m’a beaucoup touché! Ce que j’ai envie de dire aux gens, c’est : allez dans les musées, c’est la meilleure chose à faire! Il y a beaucoup de livres aussi! Soyez curieux!

La pièce Nmihtaqs Sqotewamqol / La Cendre de ses os, écrite et mise en scène par Dave Jenniss, est présentée au Théâtre La Licorne de Montréal jusqu’au 12 novembre 2021. Toutes les infos ici.

Pour suivre les créations d’Ondinnok, c’est ici.

Texte : Karine Tessier

Photo : Amber Dawn Bellemare.

Des miroirs. Une série de photographies dissimulées sous un foulard. Une tringle à laquelle sont suspendus des sous-vêtements de dentelle. Des rideaux de mousseline immaculés. Mais, surtout, des centaines d’égoportraits disposés sur un immense mur blanc. Bienvenue dans le boudoir de Amber Dawn Bellemare, lieu de présentation de son exposition/performance The Parlour Project : Spider, Fly, and Web, à laquelle se grefferont un livre et un documentaire.

L’œuvre immersive de la Montréalaise, à la fois provocante et sensible, illustre la réalité vécue par l’artiste en tant qu’ex-travailleuse du sexe, utilisant les contributions de ses clients pour financer ses créations. Amber Dawn Bellemare y explore les multiples facettes de la femme, réfléchit sur la marchandisation de son corps, le pouvoir, les normes sociales ou les médias sociaux. Encore davantage, elle souhaite raconter le plus vieux métier du monde en allant au-delà de la superficialité, des préjugés, de la honte. Rencontre avec une artiste pour qui rien n’est tout noir ou tout blanc.

Comment vous est venue l’idée de départ de cette exposition/performance?

Je ne pourrais pas dire qu’elle est venue d’une seule chose. Comme je réalise des documentaires, c’est cette partie du projet qui m’a d’abord intéressée. Les égoportraits, pris avant et après chacun de mes rendez-vous avec mes clients, et parfois pendant, n’étaient que pour moi. Lorsque je les montrais à mes amis proches, chacun avait quelque chose de différent à dire. C’était le point de départ de multiples conversations.

Ça m’a fait réaliser à quel point ces photographies – il y en a plus de 1 800 – étaient pleines de sens, mettaient au défi les gens. C’est une opportunité d’aller au-delà de l’image, de vraiment voir la personne qui se cache derrière. On y voit la beauté de la vérité, et c’est ce que je voulais exprimer avec ces portraits de moi.

Photo : Amber Dawn Bellemare.

Quelle réaction vous souhaitez susciter auprès du public qui visitera votre studio?

Je souhaite qu’ils voient quelque chose en eux qui les aidera à adoucir leur cœur, à s’élever. Toutefois, si les gens ne voient dans mon œuvre qu’un objet sexy qui les allume, je ne les jugerai pas. Ce sera suffisant. Ça suscitera d’autres types de conversations.

J’espère créer un moment d’intimité avec le public, connecter avec lui. Il y a plusieurs niveaux à cette interaction. Les gens qui viendront visiter mon boudoir, ils s’offriront, en quelque chose, et j’en suis pleine de gratitude. Ensuite, il y a la connexion, l’espace où nous pourrons nous rejoindre.

Comment s’est passée votre collaboration avec Sharon Bass, artiste, aînée et mentor Anishinaabe, White Thunderbird Woman?

Lorsque nous nous sommes rencontrées à Vancouver, nous avons immédiatement connecté. Elle dirigeait un cercle de guérison. Et elle m’a prise sous son aile. Elle m’a enseigné qu’on doit cultiver qui nous sommes vraiment. L’identité, c’est l’histoire de notre vie.

Sharon m’a guidée dans le processus créatif, qui permet l’exploration de notre identité et la guérison de l’âme. J’ai voulu créer un espace sécuritaire, avec des rituels spécifiques, pour réfléchir et partager. Parce qu’il est nécessaire d’apaiser les deux parties pour arriver à un dialogue ouvert et sincère, puis à une réconciliation.

Comment The Parlour Project vous a-t-il changée?

Je ne me sens plus vulnérable, désormais. Il m’a permis de me libérer à l’aide de la vérité. Ç’a été une guérison pour moi. Et j’ai aussi pu assister à la guérison d’autres personnes, dans le processus. Me présenter en tant qu’artiste, plutôt que comme travailleuse du sexe, ça ouvre des canaux de communication, notamment avec ma famille. Les gens ont accepté ma démarche. Et c’est très apaisant, thérapeutique, de se défaire de la honte ou du jugement.

Vous dépeignez le travail du sexe d’une manière inédite, qui va au-delà du traumatisme, qui a même certains aspects positifs.

Beaucoup de travailleuses du sexe se décriraient comme thérapeutes. Le sexe est souvent utilisé comme un remède. Bien sûr, je ne parle pas pour toutes. Mais, d’une certaine manière, comme c’est le cas avec le reiki, la massothérapie, la psychologie, nous connectons avec les gens qui nous paient.

Le traumatisme peut être incroyable! Il s’agit d’une opportunité de grandir, de développer une plus grande compassion pour l’être humain. Je choisis de voir le beau dans l’être humain.

 

L’exposition/performance The Parlour Project : Spider, Fly, and Web de Amber Dawn Bellemare est présentée du 19 au 28 septembre au studio du Wolf Lab, un collectif montréalais de femmes artistes.

Pour toutes les informations : www.theparlourproject.com

Texte : Karine Tessier

The Butterfly Effect, de Mirov. Photo : artch.org

Du 27 au 30 septembre, si vous passez par le Square Dorchester, vous aurez la surprise d’y trouver plus de 150 œuvres d’art contemporain, disposées dans des arches blanches. Des peintures, photographies, sculptures, impressions textiles et meubles créés par 21 artistes émergents, dans le cadre de la première édition du projet Artch. Fragments Urbains est allé faire un tour sur les lieux, alors qu’on s’affairait au montage de cette exposition d’envergure.

Chimère, de Richelli. Photo : artch.org

L’initiative, née d’une collaboration entre Art souterrain, Carrefour jeunesse-emploi Montréal Centre-Ville et JACK Marketing, vise à faire découvrir des créateurs prometteurs au public autant qu’au marché de l’art. Ces jeunes ont été sélectionnés par un jury au printemps dernier, puis ont reçu une bourse de 1 000 dollars, ainsi qu’une formation d’une cinquantaine d’heures. Ils ont pu approfondir leurs connaissances sur la gestion financière, les droits d’auteur, le réseautage, la scénographie. L’événement qui se déroule cette semaine, en plein cœur du centre-ville de la métropole, c’est la dernière étape du projet Artch.

Femme paisible, de Kevin Calixte. Photo : artch.org

« J’ai déjà fait des expositions dans des cafés ou de petites galeries privées. Mais un événement grand public, touchant autant de personnes, c’est la première fois, confie Geneviève Bilodeau-Blain. Avoir la reconnaissance d’un jury aussi prestigieux, c’est vraiment super. C’est un beau projet inclusif, même pour ceux qui, comme moi, sont autodidactes. »

« Je me souviens de la phrase d’un galeriste : « Si je prends un artiste sous mon aile, c’est comme si je me mariais avec. » Ça permet de comprendre pourquoi c’est dur d’entrer dans les galeries. Artch permet d’avoir une belle visibilité, de se faire connaître du grand public, mais également du marché de l’art », explique Thierry du Bois.

Diffractions glorieuses, de Maude Corriveau. Photo : artch.org

Pour épauler ces 21 jeunes créateurs, des ambassadeurs, comme Claudine Prévost, Francisco Randez, Anaïs Favron et Marie-France Bazzo. Et aussi une porte-parole, Geneviève Borne. « J’adore la jeunesse! J’adore encourager, donner un coup de main. J’ai été vraiment charmée par les œuvres de ces jeunes artistes là. Et j’ai été charmée par le programme, en fait, qui leur donne accès à un lieu très, très passant du centre-ville de Montréal. »

L’exposition Artch, c’est également l’occasion idéale de s’initier à l’art contemporain, qu’on souhaite ici démocratiser. Des ateliers gratuits sont d’ailleurs offerts au public. Et, sur le site du Square Dorchester, des guides seront présents pour orienter les visiteurs et leur faire découvrir leurs coups de cœur.

Crumbling Love, de Chloé Larivière. Photo : artch.org

« L’art contemporain, c’est tellement large. Le public ne sera pas forcément touché par tel art, mais il le sera par un autre. Et je pense que chacun peut trouver un petit peu un point d’accroche », affirme Thierry du Bois. Le photographe présentera notamment au public son projet Monster. « Ce sont des têtes de tracteurs, qui représentent un peu le visage des travailleurs des temps modernes. Les nouvelles technologies ont complètement transformé le paysage dans lequel on est. »

Monster, de Thierry du Bois. Photo : artch.org

De son côté, Geneviève Bilodeau-Blain propose aux visiteurs des collages colorés. « Je joue avec le microscopique, le macroscopique. Je mélange l’abstraction avec ce que je pense être du moléculaire, comme toutes les dynamiques internes. C’est un peu un clin d’œil à ma formation universitaire en biologie. »

Balançoire, de Geneviève Bilodeau-Blain. Photo : artch.org

Amoureuse de l’art contemporain, la porte-parole Geneviève Borne lance une invitation enthousiaste au public. « Ça nourrit l’âme de contempler de l’art. C’est ludique! C’est inspirant! Ce que je souhaite aux jeunes artistes, c’est de vendre des œuvres au public, d’être découverts par des collectionneurs ou des galeries d’art. C’est comme ça, parfois, qu’une carrière est lancée. »

Buffet galbé, de Douglas Mackay. Photo : artch.org

L’exposition Artch est présentée du 27 au 30 septembre 2018 au Square Dorchester, à Montréal.

Pour toutes les informations : artch.org

Texte : Karine Tessier

Visuels créés par les artistes Pénélope et Chloë.

Du 25 mai au 3 juin, à Montréal, les murs s’abattent. Entre les différentes disciplines artistiques. Entre ceux qui foulent les planches et le public. Mais aussi dans les profondeurs insondables de notre imaginaire. À OFFTA, festival d’arts vivants, on laisse à une cinquantaine d’artistes du théâtre, de la danse et de la performance tout l’espace nécessaire pour créer. Pour cette 12e édition, ils s’interrogent sur les frontières, un thème aussi rassembleur que polarisant. Morceaux choisis d’une programmation débridée, qui fait la part belle à l’hybridité.

Danse Mutante, c’est le relai chorégraphique imaginé par l’incontournable Mélanie Demers et sa compagnie MAYDAY. Prenant racine dans la métropole, la création poursuivra sa route à New York, Bamako, Anvers/Rotterdam, avant de se poser à nouveau à Montréal, à l’automne 2019, à l’occasion d’un événement-marathon. On savourera chaque mouvement esquissé par Francis Ducharme et Riley Sims, sur des mélodies de Mykalle Bielinski.

Si vous êtes charmé par les rimes et les notes envoûtantes de cette dernière, sachez qu’elle proposera, à OFFTA, son concert immersif Mythe, où s’entrelacent chant polyphonique, poésie orale et improvisation. La communion de six femmes, qui chanteront leur rapport au temps, à l’autre, à elles-mêmes.

À mille lieues de l’univers éthéré de Mykalle Bielinski, MAC(DEATH), de Jocelyn Pelletier. Sur scène, l’œuvre de Shakespeare prend des airs de concert métal. L’artiste fait un doigt d’honneur aux codes traditionnels, désireux de faire résonner les classiques ici et maintenant.

Il y a 70 ans, ce sont les signataires du manifeste Refus global qui se questionnaient sur les contraintes sociales. Leur percutant texte trouve-t-il encore écho auprès des Québécois, des décennies après sa parution? L’exposition Refus Contraire, à laquelle une vingtaine d’artistes et d’intellectuels ont contribué, se penche sur la question. À voir à la Galerie de l’UQAM, du 16 mai au 16 juin.

Vous vous passionnez pour l’envers du décor? Tendez l’oreille à la quotidienne OFF.Radio, qui proposera, tout au long du festival, des panels et des performances en lien avec sa programmation. Les émissions, enregistrées au Monument-National, seront disponibles sur les différentes plateformes de l’événement. Parmi les thèmes abordés : la notion de frontière dans le processus de création, la mémoire collective, les arts du cirque.

Pour son œuvre performative et expérimentale Nous serons universel.le.s, Kamissa Ma Koïta s’est nourrie autant des approches féministes, des mouvements altermondialistes et queer, que de la culture populaire. Une expérience immersive, où vous vous interrogerez sur les notions de privilèges sociaux.

L’une des six résidences de création présentées lors de cette 12e édition d’OFFTA, le projet Après la rue, de Mireille Camier et Ricard Soller i Mallol, juxtapose les récits de quatre artistes qui ont vécu de l’intérieur un mouvement de contestation populaire d’importance : la révolution verte à Téhéran en 2009, la révolution du jasmin à Tunis en 2011, les indignés à Barcelone en 2011, ainsi que le printemps érable à Montréal en 2012.

Aalaapi ᐋᓛᐱ, c’est un laboratoire conçu à partir d’un documentaire radiophonique, fruit d’une collaboration entre Québécois et Innus, qui donne la parole à des jeunes de 20 à 32 ans, qui se confient sur leurs passions, leurs peurs, leurs doutes.

Finalement, un rendez-vous incontournable de ce festival d’arts vivants, le MixOFF – Frontières & Boundaries, le résultat de plusieurs semaines de rencontres entre artistes et chercheurs, qui ont réfléchi ensemble sur le thème des frontières.

Pour tout savoir sur la programmation : offta.com

Texte : Karine Tessier

Pour sa 11e édition, la foire Papier 18 se pose encore cette année dans les vastes espaces d’Arsenal art contemporain Montréal, dans le quartier Griffintown. Du 19 au 22 avril, le premier événement du genre en Amérique du Nord vous donne à voir les créations de 300 artistes, représentés par 40 des plus importantes galeries d’art canadiennes. Voici les suggestions de Fragments Urbains pour profiter à fond de cette célébration.

Kiosque de la Galerie Hugues Charbonneau, Papier 16. Photo : Jean-Michael Seminaro.

Il s’agit de votre initiation aux arts visuels et vous aimeriez être guidés? Papier 18 a pensé à vous en offrant différentes visites commentées. Et si vous n’êtes pas rassasiés, pourquoi ne pas assister à l’une des nombreuses tables rondes? À la discussion L’Art thérapie : de la théorie à l’action, seront présentées des réalisations témoignant de l’impact concret de l’art thérapie dans la métropole. En 2018, y a-t-il encore des sujets tabous en arts visuels? Absolument! Il en sera question au panel Damage Control : Dealing With Controversy In Recent Contemporary Art. Alors qu’il est question depuis plusieurs années du fameux plafond de verre qui empêcherait les femmes d’atteindre les plus hautes sphères des affaires, des finances et de la politique, qu’en est-il du milieu de l’art contemporain? On réfléchira à la question à la table ronde Le Plafond de verre : la place des femmes dans le milieu de l’art contemporain.

Oeuvre de Dominique Pétrin, kiosque de la Galerie Antoine Ertaskiran, Papier 17. Photo : Jean-Michael Seminaro.

Vous préférez déambuler d’un kiosque à l’autre librement? Ne passez pas sans vous arrêter devant l’espace de la Galerie Antoine Ertaskiran, de Montréal. Vous y attendront les créations de Kim Dorland, connue pour ses forêts tantôt sombres, tantôt aux couleurs néon, les buildings de nuit d’Aude Moreau et les collages de papier sérigraphié de Dominique Pétrin.

Stikki Peaches, Jasmine, 2017, Mixed-Media on cardboard, 87,63 x 87,63 cm.

De son côté, la Galerie Station 16, située dans la métropole, revient cette année avec les sculptures aux messages politiques, sociaux et environnementaux de Laurence Vallières, les célèbres boîtes de sirop d’érable de WHATISADAM, ainsi que les œuvres empreintes de la culture pop des années 1980 et 1990 de l’incontournable Stikki Peaches.

Kit King, Gemini, 2017, Huile sur papier, découpé et riveté sur un support acier et aluminium, 127 x 188 cm.

Les artistes du kiosque de la Galerie Youn, de Montréal, ne laisseront personne indifférent. Kit King présentera ses portraits intimes qui défient les normes. Robin Crofut-Brittinham exposera ses réflexions délicates, entre mythologie et science-fiction, sur les relations qui unissent l’humain, la flore et la faune. Puis, il y aura les sculptures de papier découpé de Joey Bates, des fleurs immaculées minutieusement travaillées.

Du côté du Studio 21 Fine Art, d’Halifax, il vous faut admirer les tissages composés de découpures de magazines d’I-Chun Jenkins.

Poursuivez votre visite en allant jeter un œil aux oiseaux de proie de René Derouin, au kiosque de la Galerie Michel Guimont, de Québec, de poétiques observations sur la nature et la société actuelle.

Suite Ottawa No.18 – Gabrielle (Roy)
2018, eau-forte rehaussée à l’acrylique et au graphite, 30 x 23 cm.

Vous êtes des fans finis du très populaire Marc Séguin? Vous serez comblés en visitant la foire. Deux kiosques auront sur leurs murs des créations du célèbre Québécois, soit la Galerie Simon Blais, située dans la métropole, et la Galerie Jean-Claude Bergeron, d’Ottawa.

Shan Kelley, Disclosures (In the warmth of her arms I thought only of you.) (2017).

Cette année, plusieurs des créateurs présents à Papier 18 vous proposeront des œuvres qui nourriront les débats sur l’identité, qu’on parle de culture, de genre, d’orientation sexuelle ou de santé. De la Galerie Pierre-François Ouellette art contemporain, de Montréal, Meryl McMaster réfléchit sur les perceptions des cultures autochtones et européennes. Karen Tam, elle, illustre les représentations de l’Asie en Amérique du Nord et en Europe, quelque part entre les traditions et la société de consommation. Vous pourrez voir ses œuvres au kiosque de la Galerie Hugues Charbonneau, toujours de Montréal. Paul Petro Contemporary Art, de Toronto, exposera les fleuris sombres de Zachari Logan, qui explore, dans son travail, l’identité masculine. Et la galerie dc3 Art Projects, d’Edmonton, vous présentera les mots de Shan Kelley. L’artiste activiste exprime dans ses tableaux ses pensées sur l’identité, l’adversité, la maladie.

Oeuvres de Mitch Mitchell, kiosque dc3 Art Projects, Papier 17. Photo : Jean-Michael Seminaro.

Pour toutes les informations sur la foire Papier 18 et sa programmation : papiermontreal.com

L’an dernier, à l’occasion de Papier 17, nous nous étions entretenus avec les dirigeants de la Galerie Station 16, de la Galerie Trois Points et de la Galerie Robert Poulin. Pour lire leurs réflexions sur l’impact de la foire sur les affaires de leurs galeries, ainsi que la place des médias sociaux dans le marché de l’art contemporain, c’est ici.

Texte : Karine Tessier

L’affiche de la 34e édition de Vues d’Afrique, une oeuvre de Mucyo, artiste lauréat du concours d’illustration 2018.

La 34e édition du Festival international de cinéma Vues d’Afrique bat son plein à Montréal du 13 au 22 avril 2018. Le plus grand événement du genre consacré au continent africain et à sa diaspora propose aux cinéphiles 88 films de 33 pays, mais également des concerts, des découvertes gastronomiques, des expositions d’arts. Incursion dans la programmation de cette célébration incontournable de la diversité.

Vous appréciez les courts et longs métrages africains, mais admettez en connaître bien peu sur l’industrie cinématographique de ce continent? Trois documentaires vous permettront d’en comprendre les rouages. Dans Écran à fric, écran magique, de Cédric Souaille, projeté en première mondiale, on s’interroge sur le phénomène Nollywood, la prolifique industrie du cinéma nigériane. Dans Destin commun, hommage à trois éclaireurs du septième art, de Stéphane Vieyra, on s’intéresse à l’histoire du cinéma africain, à travers le parcours de trois de ses pionniers : Jean Rouch, Paulin Soumanou Vieyra et Ousmane Sembène. Finalement, dans Tahar Chériaa, à l’ombre du baobab, de Mohamed Challouf, on dresse le portrait du père du panafricanisme cinématographique. Soulignons qu’une exposition sur le cinéaste-ethnologue Jean Rouch est en plus présentée à la Cinémathèque québécoise pendant le festival.

Du côté de la fiction, vous devez voir la comédie parisienne La Vie de château, de Modi Barry et Cédric Ido. Vous y suivrez l’élégant Charles, chef d’un groupe de rabatteurs embauchés par des salons de coiffure afro pour attirer de nouveaux clients, qui rêve de lancer son propre commerce.

Si vous préférez les drames, I Am Not a Witch, de Rungano Nyoni, est un must. On y raconte l’histoire bouleversante d’une fillette de neuf ans accusée de sorcellerie par les habitants de son village et envoyée dans un camp de sorcières.

Les plus petits et les plus grands apprécieront le film d’animation camerounais Minga et la cuillère cassée, de Claye Edou. Minga, c’est une jeune orpheline qui vit chez une femme acariâtre.

Passionnés d’arts engagés, on vous propose le documentaire Burkinabè Rising, l’art de la résistance au Burkina Faso, d’Iara Lee. Dans ce pays d’Afrique de l’Ouest, une communauté d’artistes et de citoyens résiste et demande des changements politiques, de façon pacifique.

Dans Aziz’Inanga, éclipse du clair de lune, d’Alice Aterianus-Owanga, projeté en première internationale, on dresse le portrait de cette influente chanteuse, qui mêlait rythmes traditionnels, jazz et pop. Celle qui a connu la gloire des années 1970 à 1990 est disparue de la scène musicale de façon brutale il y a 20 ans, un mystère que la documentariste tente de percer.

Profitez de votre passage au festival pour vous détendre au Baobar, situé à la Cinémathèque québécoise. Pendant la durée des festivités, vous y trouverez des traiteurs haïtien et africain, des spectacles de musique, ainsi qu’une sélection de courts métrages de réalité virtuelle. Ces films vous plongeront, entre autres, dans un festival d’arts de rue au Ghana et une zone de guerre du Sud-Soudan.

Vues d’Afrique, c’est aussi le Rallye-Expos, un parcours d’arts visuels à découvrir gratuitement un peu partout dans la métropole jusqu’au 30 juin prochain. Ce mois-ci, il vous sera notamment possible de visiter une exposition photo au Consulat général d’Égypte et d’apprécier le talent de photographe du rappeur Samian à La TOHU.

Pour toutes les informations sur le Festival international de cinéma Vues d’Afrique et sa programmation, rendez-vous au : www.vuesdafrique.com

Texte : Karine Tessier

Le collectif d’art engagé ATSA, Quand l’Art passe à l’Action présente, du 16 au 19 novembre, un événement de mobilisation citoyenne et artistique pour contrer les paradis fiscaux et les iniquités qui en résultent. Pas d’Radis Fiscaux : l’État d’Urgence propose, à la place Émilie-Gamelin de Montréal, des activités artistiques, d’information et d’échange.

Ce rassemblement vient clore une année 2017 chargée pour le groupe, qui fête cette année son 20e anniversaire. Au printemps dernier, il nous avait conviés à l’imposant Cuisine ta Ville, sur l’esplanade de la Place des Arts, dans la métropole. Puis, ATSA, Quand l’Art passe à l’Action est parti en tournée avec sa bien connue activité Le Temps d’une Soupe dans plusieurs arrondissements montréalais, ainsi qu’à Vancouver, en France, au Royaume-Uni et en Autriche.

Un an après le scandale des Panama Papers, et quelques jours à peine après les révélations sur les Paradise Papers, le sujet de l’évasion fiscale défraie les manchettes plus que jamais. On peut dire que Pas d’Radis Fiscaux : l’État d’Urgence arrive à point. Les cofondateurs d’ATSA, Quand l’Art passe à l’Action, Annie Roy et Pierre Allard, travaillent depuis quatre ans à cet événement, qui vise à informer, dénoncer, mais également à réfléchir à des solutions pour éradiquer les inégalités. Parce que, si les thèmes abordés par le collectif sont durs, ses créations ne sont jamais dénuées d’espoir.

Photo : page Facebook de ATSA, Quand l’Art passe à l’Action.

La programmation

Pour lancer les activités, le 16 novembre, le Radis Fiscal, un objet insatiable qui bouffe tout ce qui l’entoure, sera démoli sur la place publique. La destruction de cette piñata géante servira de défouloir, tout en étant le symbole d’une libération des « petits » face à une élite vorace, qui cherche constamment à accroître son pouvoir et ses gains matériels.

Puis, pendant quatre jours, la population aura l’embarras du choix : conférences, kiosques d’information, projection de documentaires, prestations musicales, performances, expositions, activité Le Temps d’une Soupe… Le tout présenté gratuitement, à l’extérieur et sous des chapiteaux chauffés.

Photo : page Facebook de ATSA, Quand l’Art passe à l’Action.

Pour ceux qui n’auraient jamais participé au Temps d’une Soupe, il s’agit d’une rencontre entre deux personnes qui ne se connaissent pas, qui discutent d’un thème (cette fois-ci, les paradis fiscaux) en dégustant un bol de soupe fumante préparée par les restaurants Soupesoup. Avant de se dire au revoir, les participants prennent la pose, des portraits qui s’ajouteront aux 2 033 photos réalisées ici comme à l’étranger.

Vous aimeriez participer à la création d’une œuvre d’art visuel? Le génial Émmanuel Laflamme invite la population à construire avec lui un grand château de cartes de crédit. De son côté, avec Cartographie sociale, Emmanuelle Jacques poursuit sa fascinante démarche sur l’espace. Vous pourrez, à l’aide des estampes et cartes créées par l’artiste, décrire vos trajets quotidiens, vos endroits préférés ou, au contraire, ceux que vous évitez.

Si vous n’avez jamais assisté à la pièce Hidden Paradise, d’Alix Dufresne et Marc Béland, voilà votre chance de voir une répétition bonifiée de l’œuvre inspirée d’une entrevue donnée par le philosophie Alain Deneault (qui participe également à Pas d’Radis Fiscaux : l’État d’Urgence) sur les évasions fiscales.

Pour les mélomanes, les concerts du rappeur Emrical et du musicien Doctor Nativo, qui mélange habilement reggae, hip-hop, cumbia et musique traditionnelle maya, sont à inscrire à l’agenda.

Vues de la rue. Photo : Mikaël Theimer.

À voir aussi, l’exposition de photos Vues de la rue réelle, le regard que portent sur la métropole des personnes en situation d’itinérance ou à risque, en collaboration avec le photographe Mikaël Theimer.

Et, si vous avez envie de vous engager, sachez que les organisateurs sont toujours à la recherche de bénévoles!

Annie Roy et Pierre Allard, cofondateurs d’ATSA, Quand l’Art passe à l’Action. Photo : Jean-François Lamoureux.

3 questions à Annie Roy, cofondatrice d’ATSA, Quand l’Art passe à l’Action

Au printemps dernier, quelques jours avant l’événement Cuisine ta Ville, nous nous étions entretenus avec l’artiste. Morceaux choisis de cette rencontre avec une femme passionnée, jamais à court d’idées pour changer le monde.

ATSA, Quand l’Art passe à l’Action a 20 ans cette année, en 2017. Comment arrive-t-on à se renouveler constamment après tant d’années?

Pour nous, à chaque fois qu’on crée, c’est la découverte d’un nouveau monde. C’est ça qui est extraordinaire de notre travail. Il y a une thématique qui prend forme. Et on va faire une sorte d’architecture sociale autour de ça, un événement qui va nous fusionner, nous mettre ensemble, nous faire vivre quelque chose d’extraordinaire, on l’espère, et qui va briser aussi des exclusions. Quand on est dans la rue et qu’on invite du monde de partout, on surprend les gens, on les sort de leur zone de confort. Ça les fait aller vers l’autre différemment. On brise des idées préconçues.

Vous abordez dans vos œuvres des thèmes durs, mais elles ne sont jamais dénuées d’espoir.

Il faut avoir le courage de la paix. Je pense que, dans notre travail d’artiste, c’est devenu de plus en plus important de trouver des moyens de travailler à la compréhension de l’autre, tout en dénonçant et en critiquant certaines situations. C’est vraiment différent d’être en contact direct. C’est une autre manière de s’informer, qui n’est pas des statistiques, des lectures, de grosses nouvelles.

Est-ce pour cette raison que vous avez changé le nom de votre collectif en 2001?

À l’époque, quand on s’appelait Action Terroriste Socialement Acceptable, il y avait un peu de romantisme révolutionnaire derrière tout ça. C’était vraiment conceptuel : on va exploser dans l’espace public, on va être fortement médiatisés, on va mettre la lumière sur une cause. Mais sans violence réelle. De là le « Socialement Acceptable ».

Avec les années, la médiatisation des actes terroristes, les amalgames par rapport à certains groupes de personnes, le terme « terroriste » a perdu de sa connotation, je dirais, un peu plus large. En plus, on a des œuvres, maintenant, qui vont à l’international, qui vont à la rencontre de populations dans des endroits où de tels événements arrivent souvent. Et ça devient un manque de respect.

On a donc recentré le nom du collectif sur l’art, sur notre slogan, qui existe depuis de nombreuses années déjà. Le but n’est pas de faire table rase. Au contraire! Mais le monde a changé. Et, aujourd’hui, on a encore plus besoin d’événements comme les nôtres sur la place publique, pour mettre les gens en lien, contrer la violence et les préjugés.

 

Pas d’Radis Fiscaux : l’État d’Urgence, un événement de l’ATSA, Quand l’Art passe à l’Action, du 16 au 19 novembre 2017, à la place Émilie-Gamelin, à Montréal. Pour toutes les informations : www.atsa.qc.ca

Texte : Karine Tessier

À l’occasion de la 27e édition du festival Présence autochtone, du 2 au 9 août 2017, les Montréalais et les touristes ont l’embarras du choix! De la musique, de la danse, du cinéma, des arts visuels, de la gastronomie, des conférences… Une tonne d’activités, dont plusieurs tout à fait gratuites, pour aller à la découverte des cultures des Premières Nations d’ici et d’ailleurs. L’occasion rêvée, en cette année du 375e anniversaire de la métropole, de tisser des liens d’amitié entre les communautés et d’embrasser les différences. Morceaux choisis d’une programmation à la fois engagée et festive.

Parmi les grands événements à ne pas rater, Nikamotan Mtl, un rendez-vous doux entre des auteurs-compositeurs-interprètes de la relève autochtone et des artistes bien connus de la scène musicale québécoise. Quatre duos qui vous offriront des pièces à deux et en solo : Natasha Kanapé-Fontaine et Random Recipe, Matiu et Dramatik, Esther Pennell et La Bronze, Laura Niquay et Sunny Duval (ancien membre des Breastfeeders). Le 4 août à la Place des Festivals.

 

Le lendemain, le rassemblement artistique et festif Nova Stella, qui célèbrera l’art d’être différents ensemble, enflammera la Place des Festivals dès l’heure du dîner. Le point culminant, en soirée, sera un grand spectacle musical qui réunira notamment sur scène Mamselle Ruiz, Karim Diouf, Pierre Kwenders, Jacques Jacobus (de Radio Radio), le groupe Sonido Pesao, Jenny Salgado, Loco Locass et Nomadic Massive.

Du 3 au 6 août, la Place des Festivals se métamorphose! Vous y retrouverez une maison longue et des tipis, des structures animalières lumineuses dans les fontaines, des spectacles, des courts métrages, de la création en direct par des artistes visuels, de la street food autochtone… Ça vaut le détour.

LUMIÈRES SUR L’EAU de Ariel St-Louis Lamoureux et Nicolas Lachapelle – BANDE ANNONCE from Les Films du 3 mars on Vimeo.

Pour ceux qui préfèrent l’ambiance feutrée des salles de cinéma, Présence autochtone a programmé des dizaines de courts, moyens et longs métrages, de fiction tout autant que documentaires. Parmi nos coups de cœur, le documentaire Lumières sur l’eau, d’Ariel St-Louis Lamoureux et Nicolas Lachapelle. Pendant un an, on y suit des enfants de Waswanipi, une communauté crie du Nord du Québec, aux multiples influences culturelles et en plein questionnement sur leur identité.

Two Soft Things, Two Hard Things (Official Trailer) from Mark Kenneth Woods on Vimeo.

Abordant aussi les thèmes de la jeunesse et de l’identité, Two Soft Things, Two Hard Things est un documentaire de Mark Kenneth Woods et Michael Yerxa sur la préparation d’un défilé LGBTQ au Nunavik, après 60 ans de colonisation durant lesquels, au nom de la religion, on a condamné le point de vue de la communauté innue sur la sexualité et la famille.

Les fans de musique se régaleront avec Rumble : the Indians Who Rocked the World, de Catherine Bainbridge et Alfonso Maiorana, un documentaire qui explore l’influence des musiciens des Premières Nations sur la musique pop en Amérique.

Tribal Justice Trailer from Makepeace Productions on Vimeo.

La cinéaste Anne Makepeace, de son côté, s’est penchée sur les tribunaux autochtones, axés sur des principes traditionnels de réparation et de guérison, plutôt que sur la justice punitive. Elle nous présente le fruit de ses recherches dans son documentaire Tribal Justice.

Du côté des arts visuels, on vous suggère d’aller admirer les créations de Carmen Hathaway, des pièces où se côtoient la culture traditionnelle et les nouvelles technologies. L’exposition From Smoke to Cyber Signals est présentée à l’Espace culturel Ashukan jusqu’au 1er septembre prochain.

Du côté de La Guilde, jusqu’au 19 août, vous pourrez découvrir les sculptures d’Abraham Anghik Ruben, un artiste inuvialuit qui s’inspire des mythes et des légendes des peuples nordiques. Dans Les Esprits se rencontrent : interactions Vikings-Inuits, chaque œuvre est accompagnée de son dessin préparatoire.

Et pour ceux qui ne pourront se rendre au festival cette année, vous pouvez toujours visionner, du 2 au 9 août, sur le site Web de l’événement deux documentaires sur les luttes de communautés pour préserver leur patrimoine face à la menace d’entreprises.

La 27e édition de Présence autochtone est présentée à Montréal du 2 au 9 août 2017. Pour tout savoir sur le festival : www.presenceautochtone.ca

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